Ressources pédagogiques en ligne et Web 2.0
Ontologie, Indexation, bookmarking et folksonomie
 
Quels apports et quelles limites pour les usagers,
acteurs-clés du web éducatif ?

Réflexions à partir de l'ENT Libre « Iconito »
et de l'outil de social bookmarking « Blinklist »

Michèle Drechsler
 

Résumé : Les enseignants sont les professionnels de la pédagogie. Les ressources pédagogiques se situent dans le coeur de leur métier. Le Web2.0 propose de nouveaux services en ligne comme les outils de « social bookmark ». Avec l'ENT-Libre « Iconito » les enseignants peuvent mettre en ligne des ressources selon des champs prédéfinis déterminés selon des critères reposant sur les besoins du métier. C'est une tout autre approche de la recherche sur le Web où le travail d'indexation n'est plus fait par des robots mais par la communauté des enseignants qui peuvent « taguer » les ressources. Quels apports et quelles limites pour les usagers ? Notre réflexion s'appuie sur la base de ressources de l'ENT libre « Iconito » et un outil de social bookmarking « Blinklist ».
Mot-clés : ressources, indexation, socialbookmarking, folksonomie, pédagogie, ENT

Abstract : The teachers are the professionals of pedagogy. The teaching resources are in the heart of their trade. The Web2.0 proposes new services on line like tools of « social bookmark ». It is a very other approach of research on the Web where the work of indexing is not made any more by robots but by the community of the teachers who can « tag » the resources. Which are the contributions and the limits for the users ?
Keywords : resources, indexing, socialbookmarking, folksonomy, pedagogy, ENT (Numerical environment of work)

Contexte

   L'administration française est en pleine mutation en devenant « électronique ». Le programme gouvernemental ADELE 2004-2007 (ADministration ELEctronique) prévoit un traitement personnalisé, centré sur les besoins individuels de chaque usager, dans une relation privilégiée avec les services publics. Le Ministère de la Fonction publique, de la Réforme de l'État et de l'Aménagement du territoire (Secrétariat d'État à la Réforme de l'État)a mis en place le Plan d'Action de l'Administration Électronique (P2AE) 2004-2007. L'Agence pour le Développement de l'Administration Électronique ADAE a été créée. L'administration « Éducation Nationale » soucieuse de s'inscrire dans le cadre de la LOLF pour « travailler mieux » avec plus d'efficacité ne peut pas se dispenser de réfléchir et de mettre en place des dispositifs innovants et fonctionnels afin de répondre aux attentes de ses usagers. Elle favorise le déploiement des environnements numériques de travail ou « bureaux virtuels » constitués d'un ensemble homogène de services numériques : travail collaboratif, vie scolaire, accès aux ressources numériques...

   Les ENT constituent une offre éducative d'outils, de services et de contenus intégrant les TIC. Ils s'inscrivent dans une dynamique d'usages et s'adressent à l'ensemble des usagers, élèves, parents d'élèves, personnels administratifs et techniques et d'encadrement des établissements scolaires et des écoles. Les ENT permettent de mettre à disposition des utilisateurs les moyens de travailler individuellement et collectivement dans toutes les situations concrètes de travail. Les ENT se doivent aussi d'assurer aux utilisateurs nomades que sont les enseignants et les élèves une continuité d'accès aux informations et aux fonctions qui les concernent. S'ils visent à offrir à chaque élève un espace personnel, tout à la fois pupitre virtuel, classeur et casier personnel, y compris en dehors des heures de classe et en dehors de l'école, facilitant ainsi les apprentissages, pour l'enseignant, les ENT peuvent apporter « un plus » pour la préparation de sa classe, en lui proposant un accès aux ressources pédagogiques, aux outils collaboratifs de travail. Dans notre exposé nous montrerons comment les ENT peuvent s'inscrire dans le paysage du système éducatif et peuvent être des « leviers » du pilotage intégrant la gestion des connaissances et visant avant tout la professionnalisation des enseignants.

   Les enseignants sont les professionnels de la pédagogie. Les ressources pédagogiques se situent dans le coeur de leur métier et ont une place stratégique dans les dispositifs de pilotage intégrant la gestion des connaissances. Nous ne pouvons pas nier la richesse de leur production, de leur utilisation et leurs apports en matière de formation et de professionnalisation. Des formes nouvelles de formation professionnelle des enseignants voient le jour dans les dispositifs de pilotage des systèmes éducatifs. Elles prennent appui sur les productions pédagogiques des enseignants, individuelles ou collectives qui, bien que ne datant pas d 'hier, connaissent un essor sans précédent avec les TIC, Internet et les réseaux. Les Environnements numériques de travail vont encore renforcer cette évolution avec la mise en place de communautés d'enseignants avec la production et la diffusion de ressources pédagogiques en ligne, l'accès aux ressources.

   La mobilisation des compétences, la professionnalisation des enseignants sont au coeur du pilotage de circonscription. Les inspecteurs de l'éducation nationale (IEN) qui ont des tâches d'évaluation, d'inspection, de formation, d'animation fixées par le décret du 18 Juillet 1990 doivent l'intégrer en permanence dans leur pilotage. D'après le rapport du Haut Conseil de l'Évaluation, on ne connaît pas assez bien les pratiques enseignantes effectives. Pour Claude Thélot, « les pratiques enseignantes, entendues comme l'ensemble des activités par lesquelles les enseignants guident et font travailler les élèves qui leur sont confiés pour leur faire acquérir les savoirs, savoir-faire qui constituent les objectifs de l'école sont actuellement très mal connues. Il faut développer et capitaliser les observations des pratiques des enseignants, les études et les recherches permettant d'en apprécier l'efficacité au regard des progrès et des comportements des élèves. Enfin, il faut organiser la diffusion des résultats des recherches sur l'efficacité des pratiques enseignantes et former et inciter les enseignants à s'en emparer, notamment lors de leur évaluation et de leurs formations initiale et continue, pour améliorer l'efficacité du système éducatif » (Thélot Claude, 2003). Cela ne peut se matérialiser que par la production et la diffusion de ressources qui en sont à « la clé ». Capitaliser les expériences du terrain, les observations des pratiques pédagogiques dans les classes, animer des communautés virtuelles d'enseignants au niveau du pilotage d'une circonscription, produire de la ressource pédagogique, les échanger, les partager, pour les faire vivre et leur donner tous leurs sens et leurs valeurs, sont autant de données incontournables du KM des entreprises qui pourraient devenir un nouveau paradigme des pilotages du système éducatif.

Objectifs

   Si la production, la diffusion, le partage des ressources sont recherchés dans le cadre de ces animations et de ces formations, s'il se publie de plus en plus de très nombreuses ressources sur le Web utiles pour la professionnalisation des enseignants, la recherche d'informations sur Internet est difficile et n'aboutit pas toujours aux documents les plus pertinents.

   Dans le cadre de la modélisation d'un environnement numérique de travail pour le premier degré, il est primordial de prévoir des métadonnées à utiliser pour définir l'ensemble des informations techniques et descriptives ajoutées aux ressources pédagogiques pour mieux les qualifier, ces données utilisables par d'autres devant s'inscrire dans des modèles largement reconnus par les acteurs du Web. La construction d'une ontologie d'un web sémantique éducatif au plus près des attentes des usagers s'impose. Nous nous appuierons sur l'analyse de l'utilisation d'une base de ressources en ligne proposée aux écoles et construites à partir des besoins des enseignants. (http://iconito.fr).

   Par ailleurs, le Web2.0 propose de nouveaux services en ligne comme les outils de « social bookmark » permettant ou favorisant les connexions et les échanges entre les « enseignants » en ligne et une indexation des ressources à partir de « tags » (mots clés pour décrire une ressource). C'est une tout autre approche de la recherche sur le Web où le travail d'indexation n'est plus fait par des robots (comme les spiders de Google) mais par la communauté des enseignants qui peuvent « taguer » les ressources.

Cadre théorique et résultats

   Pour gérer la connaissance, il est important de définir une ontologie du Web dans le domaine éducatif. Comme le précise Bill Swartout « Une ontologie est un ensemble de termes hiérarchiquement structurés pour décrire un domaine et pouvant être utilisés comme squelette pour une base de connaissances » (Swartout Bill et al., 1997). L'objectif premier est de définir une ontologie et de modéliser un ensemble de connaissance dans le domaine de l'Éducation nationale. La définition de l'ontologie a également été récemment précisée pour devenir : « La spécification formelle et explicite d'une conceptualisation partagée. » (Studer Rudi, Benjamins Richard., Fensel Dieter, 1998).

Une base de ressources de l'ENT Libre « Iconito » pour les écoles

   La définition d'un « Semantic Web éducatif » pour des praticiens et artisans de la pédagogie que sont les enseignants s'impose. Le problème fondamental est de respecter la diversité des langages et des représentations du monde éducatif, tout en permettant l'échange d'information entre les acteurs et les usagers de l'éducation. L'usager, au bout, doit s'y retrouver. Que lui faut-il comme « champs » d'indexation pour chercher aisément une ressource pédagogique ? En ce qui concerne la mise en place de métadonnées, il est important de prévoir une entrée « utilisateurs » prenant en compte l'utilisateur au coeur de son métier. Quelle serait la classification la plus adaptée pour les pratiques du métier, pour la professionnalisation des enseignants ? Dewey ou Dublin Core ou LOM (Learning Object Métadata) ? Comment se mettre d'accord pour les métadonnées de LOM pour que qu'elles répondent au mieux aux besoins des usagers ? Quel est le niveau de « granulation » des ressources à prévoir pour satisfaire les usagers (enseignants, les directeurs...) dans leur requête pour chercher « la bonne ressource » sans perdre trop de temps ?

   La base de ressources pour l'ENT Iconito (http://www.iconito.fr/) prend en compte les besoins des utilisateurs, les types de ressources recherchées, le cycle, le champ des programmes, une cartographie de la connaissance « éducation » avec des mots clés associés et des tags. La description des ressources repose sur des champs de métadonnées LOM adaptées aux besoins des usagers quant au type de contenu.


En démonstration :
http://demo.iconito.fr/index.php?module=ressource&desc=default&action=getSearchAdvanced&id=2.

   Cette base de ressources de l'ENT pour les écoles contient des milliers de ressources indexées à partir de fiches sous CC prenant en compte le système d'indexation défini pour les usagers, à partir de leurs besoins. Il s'agira aussi de prévoir également les modalités organisationnelles de publication avec les enseignants ainsi que la révision de l'aspect juridique des ressources en ligne sous Creative Commons, ces dernières licences s'inscrivant dans une démarche permettant la libre diffusion des ressources pédagogiques ressemblant au modèle « du libre » et annonçant de nouveaux modèles économiques de l'édition dans le paysage éducatif actuel.

Le travail en réseaux avec un outil de social – bookmarking
Blinklist http://www.blinklist.com/

   « Blinklist » un outil de social bookmarking convainquant du Web 2.0. Ce nouveau type de service du Web 2.0 permet d'enregistrer des sites favoris, de les partager sur le Web, de les « taguer » pour les retrouver plus facilement avec des mots clés. Il est intéressant d'analyser les principes de fonctionnement de la folksonomie, néologisme désignant un système de classification collaborative décentralisée spontanée dans le domaine de l'éducation et qui peut être la base d'un nouveau Web éducatif. Dans ce cas les contributeurs d'une folksonomie ne sont pas contraints à une terminologie prédéfinie mais peuvent choisir les termes qu'ils souhaitent pour classifier leurs ressources. Ces termes sont souvent appelés « tags ». L'ensemble des mots-clés d'une personne peut être visualisé par des nuages de mots qui est le nuage de « connaissance ». Ce concept permet un survol de l'ensemble des intérêts d'une personne ou même d'un groupe, qui définissent d'une façon collaborative un nouveau Web de nouvelle génération, une autre idée d'Internet : plus collaboratif, plus interactif et plus dynamique. Pour la gestion du partage de favoris, blinklist, propose un service en ligne utilisant les technologies de type « Ajax » pour mettre en oeuvre une application rapide, efficace et conviviale. Avec Blinklist, on a non seulement la possibilité de gérer ses favoris, mais aussi de découvrir les « bookmarks » d'internautes ayant les mêmes centres d'intérêts que l'utilisateur. Avec la fonction « My Cloud », on peut représenter graphiquement les centres d'intérêts à travers le nuage de mots clés. Un nuage de la connaissance est visible à tout moment.


(http://www.blinklist.com/mdrechsler/)

   Chaque page peut être sauvée de manière privée ou publique. Lorsqu'on sauve une page, on peut la décrire avec des tags, mais si cette page a déjà été « bookmarkée » par quelqu'un, on suggère les tags qui ont déjà été attribués à cette page : libre à l'utilisateur de les accepter tels quels, d'en ajouter, d'en supprimer. Enfin, on peut aussi saisir une description pour accompagner un lien. On peut naviguer au sein de toutes les pages déjà bookmarkées par les internautes et à n'importe quel moment, on peut « blinker » une page dans son compte. À tout moment on connaît le nombre d'autres internautes qui ont « blinké » la même page. Une étoile permet de marquer ses pages préférées. Chaque bookmark est présenté avec sa description, des tags associés et une capture d'écran. Un « tagmanager » permet de naviguer au sein de ses bookmarks via différentes vues (tags favoris, tags populaires, tags récents). On peut gérer une « watchlist » de membres, ce qui permet de surveiller ce que d'autres découvrent et « bookmarkent » sur un thème. Une page d'accueil dynamique permet de voir en permanence les liens fréquentés ainsi que les liens que les utilisateurs préfèrent. On peut accéder à des flux RSS par tag, par utilisateur ce qui permet de ne pas passer à côté d'un site qui concerne la veille qui vous intéresse. Les « clouds » (nuages) montrent donc directement si telle chose est encore à explorer, ou à jeter ou à supprimer ou à exploiter selon le cas.

   Une nouvelle génération d'internautes construit en ce moment sa propre Toile, bien souvent en marge du Web « Institutionnel ». Désormais ce sont les utilisateurs de la Toile que sont les enseignants qui créent les contenus, et même qui classent les sites à la place des moteurs de recherche classiques. Les internautes se construisent ainsi un Web à leur image, très différent de la vision imposée par le Web « institutionnel » constitués des moteurs de recherche, des sites d'entreprises, des sites « marchands » et reprennent ainsi le pouvoir.

Quand le tag remplace le moteur

   Comme un nombre croissant d'internautes partagent leurs favoris en ligne, une deuxième Toile, constituée de Tags émerge peu à peu et viennent remplacer des moteurs de recherche. Certains sites se retrouvent ainsi « tagués » par plusieurs utilisateurs. Tout s'accélère en ce moment et le « tagging » s'est élargi à tous les usages du Web comme par exemple l'usage des photos avec Flickr. Avec le Web 2.0, on voit là poindre à l'horizon une réorganisation complète du contenu et des services de « réseaux sociaux » disponibles pour l'éducation nationale.

Enquête sur le socialbookmaking et les réseaux sociaux

   Olivier Le Deuff (2006) définit le terme de folksonomie et donne ses caractéristiques : « Le terme de folksonomie est apparu récemment sur le Web pour désigner le phénomène d'indexation des documents numériques par l'usager. On rencontre également fréquemment le mot tag qui désigne en quelque sorte un mot-clé. L'usage du mot folksonomie semble donc plus opportun. L'architecte de l'information Thomas Vander Wal a forgé ce terme en combinant la taxinomie (règles de classification, taxonomy en anglais) et les usagers (folk). Ce phénomène ne cesse de prendre de l'ampleur avec l'avènement des nouvelles technologies du Web, dites « Web 2.0 », qui donnent plus de possibilités d'expression à l'internaute. À l'inverse des systèmes hiérarchiques de classification, les contributeurs d'une folksonomie ne sont pas contraints à une terminologie prédéfinie mais peuvent adopter les termes qu'ils souhaitent pour classifier leurs ressources. Ces termes sont souvent appelés mots-clés ou tags ou, en français, étiquettes. Les folksonomies constituent la possibilité pour l'usager d'indexer des documents afin qu'il puisse plus aisément les retrouver grâce à un système de mots-clés. Le concept est lié à l'accroissement et à l'accélération de la production d'informations. Le système diffère donc nettement en cela des systèmes classificatoires classiques, comme la classification décimale universelle ou la classification Dewey, qui s'inscrivent dans des processus plus longs et dont le but est d'obtenir un classement cohérent de documents physiques dont le contenu est inscrit dans la durée. Les folksonomies, au contraire, ne reposent sur aucun thésaurus, ce qui confère à l'utilisateur une liberté totale quant au choix des mots-clés. Les folksonomies sont donc avant tout centrées sur l'usager. »

   Ce dernier les utilise dans un but personnel, afin d'organiser son propre système d'information. L'intérêt des folksonomies est lié à l'effet communautaire : pour une ressource donnée sa classification est l'union des classifications de cette ressource par les différents contributeurs. Ainsi, partant d'une ressource, et suivant de proche en proche les terminologies des autres contributeurs il est possible de découvrir des ressources connexes des autres internautes. Dans l'outil « blinklist », vous avez des « watchlists » avec des personnes qui vous « surveillent » avec les mêmes intérêts que vous, ce qui facilite la veille.

Quels avantages et quelles limites ?

   Dans son article, sur la folksonomie, Le Deuff Olivier (2006) précise que « La principale nouveauté de tous ces outils de « bookmarking » provient du fait que ce sont les utilisateurs qui proposent et choisissent leurs tags sans forcément de hiérarchie entre les différents tags qui constituent dans leur globalité une simple liste de mots et d'expressions de même niveau ». Il cite Adam Mathes, qui, dans son article paru en décembre 2004, résume le problème en une phrase : « Une folksonomie représente en même temps ce qu'il y a de meilleur et de pire dans l'organisation de l'information. » (Mathes Adam 2004). Il précise que Mathes montre ainsi que la force des folksonomies constitue également sa faiblesse. Sa souplesse d'utilisation et son adaptabilité infinie font que l'organisation de l'indexation par l'usager est chaotique. Pour certains professionnels de l'information, les folkosonomies peuvent dès lors être source « d'info-pollution », pour reprendre l'expression d'Éric Sutter (Sutter Éric, 1998), vidant de leur sens de nombreux mots-clés. Beaucoup de spécialistes de l'information, comme l'architecte de l'information sur le web comme Louis Rosenfeld (Rosenfeld Louis, 2005), se montrent très critiques à l'égard des folksonomies : « Il est facile de dire que les usagers des réseaux sociaux sont parvenus à réaliser ce que les bibliothécaires n'ont pas réussi : un moyen de faire fonctionner des métadonnées dans des collections de contenu largement distribuées et non connectées les unes aux autres. Facile mais faux : les folksonomies sont clairement convaincantes en favorisant une forme de navigation basée sur la sérendipité qui peut être tout à fait utile. Mais elles ne favorisent pas la recherche et les autres types de navigation de manière aussi précise que des tags émanant de vocabulaire contrôlé par des professionnels. » (Marieke Guy, Tonkin Emma, 2004). Clay Shirky lui répond sur un autre blog : « Le problème de l'analyse de Rosenfeld provient de son manque total de sens économique. [...] L'avantage des folksonomies n'est pas qu'elles sont meilleures que les vocabulaires contrôlés, mais qu'elles sont meilleures que rien, car les vocabulaires contrôlés ne sont pas adaptables dans la majorité des cas où un tag est requis. Construire, maintenir et améliorer un vocabulaire contrôlé revient très cher par rapport aux folksonomies, à la fois en temps de développement et pour l'usager, notamment l'usager amateur dans l'utilisation d'un système normé. » (Shirky Clay, 2005).

   Le principe du Tag n'est pas dénué d'intérêt rajoute Cyrille Fievet dans son article. En effet pour lui, « beaucoup, y voyant l'expression d'une nouvelle forme de démocratisation du web, défendent les tags avec vigueur » (Fievet Cyrille, 2005). « Je pense que c'est clairement un mouvement de fond. Les folksonomies sont représentatives d'un phénomène un peu paradoxal qui est que d'un côté l'usager, le client ou l'utilisateur final veut de plus en plus être placé au coeur du système en tant qu'individu et que de l'autre il souhaite s'inscrire dans une démarche communautaire ou de réseau », explique Christophe Deschamps, auteur du blog « Outils froids ». Pour Stéphane Lee, créateur du service Guten Tag, « le tag est le web sémantique du pauvre, suffisant pour créer des connexions intéressantes entre les différents contenus de la toile ». « Le principe permet de se concentrer sur ce qui est important pour la majorité des gens, sans passer des mois à délimiter le contour d'une catégorie fixe pré-déterminée et qui de toute façon ne conviendra jamais pleinement », résume-t-il. (Stéphane Lee, 2005)

   En somme la « principale vertu » de la folksonomie est « sa souplesse » et « la spontanéité » qu'elle offre aux internautes. « Les tags, en laissant aux gens déterminer ce qui compte pour eux, font apparaître de nouveaux usages. Ils permettent de faire surgir des informations qui étaient jusque là masquées : mots les plus utilisés, les plus populaires, connexions entre groupes de mots ou d'utilisateurs... », souligne-t-il. « Le principal intérêt des tags vient du fait qu'ils agissent comme un premier filtre au web. Ils constituent une cartographie du web créée collaborativement par ses utilisateurs et permettent d'obtenir rapidement un ensemble de pages déjà validées par d'autres », ajoute Christophe Deschamps.

Vers un « bookmarking » éducatif ?

   Les outils sociaux n'ont pas fait encore leur entrée dans l'Éducation Nationale. Une utilisation de ces outils serait néanmoins intéressante à mettre en place. Une expérimentation est actuellement menée visant la mesure de l'impact de socialbookmarking dans le Web 2.0 par les enseignants. (Base de ressources Iconito et utilisation de l'outil « socialbookmarking » Blinklist)
Enquête en ligne prévue http://www.formassembly.com/forms/34883, voir aussi http://ressourcesecoles.blogspot.com/.

Pour Olivier Le Deuff, quelques règles de base peuvent déjà être édictées à l'indexation ou la « Tag literacy » :

« Des règles de bonne indexation par tags ont été édictées :
  • l'utilisateur doit penser collectivement : les tags sont certes personnels mais peuvent également être utilisés par d'autres. Il faut l'avoir en tête.
  • employer le pluriel pour définir des catégories. Le pluriel est plus approprié car la catégorie peut contenir différentes variations ;
  • ne pas employer de majuscules, à moins que le mot ne puisse être compris sans ;
  • utiliser l'underscore pour définir un groupe de mots ;
  • inclure des synonymes afin d'éviter les confusions ?
  • observer et utiliser les conventions d'indexation des sites et des réseaux sociaux utilisés ;
  • contribuer à ce que les efforts d'indexation soient efficaces en collaborant et en ajoutant des tags à d'autres ressources.

... Une des solutions pour améliorer le système serait de former les utilisateurs à l'indexation par tag. Il faudrait d'abord comprendre quels sont les mauvais tags. Nous pouvons établir une liste de mots-clés mal indexés, établir une liste de tags inefficaces : les tags mal orthographiés, les tags mal conçus, notamment les groupes de mots collés ensemble ou séparés sans utiliser l'underscore, les tags personnels n'ayant aucun intérêt collectif ou encore un tag unique qui n'apparaît qu'une seule fois dans une base de données. » (Le Deuff Olivier, 2006).

   L'étude menée nous permettra de dégager l'impact du « sociabookmarking » sur les usages de Internet, la formation « pratique » et professionnelle des enseignants à travers l'usage des signets sociaux.

Conclusions et recommandations

   À travers d'enquêtes en ligne proposées aux usagers, nous pouvons dégager quels sont les apports et les limites de ces services en ligne. Si l'enjeu d'un projet d'ENT est le partage du capital intellectuel, les échanges entre les acteurs de la communauté éducative avec les TIC, le partage des ressources, l'amélioration des dispositifs d'apprentissage et formation des enseignants avec les nouveaux outils du Web, l'enjeu réside aujourd'hui dans la capacité des décideurs à gérer la diversité de l'environnement, à définir comment les TIC influenceront l'action, le temps, le lieu de la « mise en scène managériale » traditionnelle. Il est important de dégager les premières recommandations « organisationnelles » à proposer dans le cadre du pilotage du système éducatif : intégration de nouvelles organisations du travail et de formation, mise en place de communauté de pratiques et de quelques règles de bonne indexation par tag qui pourraient être à la base d'une première éducation à l'indexation ou la « Tag literacy » car la prise en compte des services en ligne du Web 2.0 avec la construction d'un Web Sémantique avec les utilisateurs qui sont au coeur et à la clé, n'est -elle pas un facteur incontournable pour agir avec plus d'efficacité ?

Michèle Drechsler
michele.drechsler@wanadoo.fr

Bibliographie

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Fievet C. (2005). Folksonomy : les tags en délire, disponible sur <http://www.internetactu.net/?p=6166>.

Lee S. (2005). <http://stephane.etsoncar.net/texts/tags> consulté le 11-03-07.

Le Deuff O. (2006). Folksonomies : Les usagers indexent le web, Bulletin des bibliothèques de France - Paris, t. 51, n° 4, p. 66-70. Disponible sur <http://bbf.enssib.fr>.

Marieke G., Tonkin E. et al. (2004). « Folk-sonomies. Tidying up Tags ? », Dlib Magazine, Volume 12, n° 1,
<http://www.dlib.org/dlib/january06/guy/01guy.html> consulté le 11-03-07.

Mathes A. (2005). Folksonomies. Cooperative Classification and Communication Through Shared Metadata.
<http://www.adammathes.com/academic/computer-mediated-communication/folksonomies.html> consulté le 11-03-07.

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<http://louisrosenfeld.com/home/bloug_archive/000330.html> consulté le 11-03-07.

Shirky C. (2005). Ontology is Overrated ; Cate-gories, Links and Tags,
<http://www.shirky.com/writings/ontology_overrated.html> consulté le 11-03-07.

Studer R., Richard B., Fensel D. (1998). Knowledge Engeeneering : Principles and Methods, Data and Knowledge Engineering 25, p. 161-197.

Sutter E. (1998). « Pour une écologie de l'information ». Documentaliste - Sciences de l'information, vol. 35, n° 2, p. 83-86.

Swartout B., Patil K. et al. (1997). Toward distributed Use of a Large-Scale Ontologies, Ontological Engineering, AAAI-97 Spring Symposium Series, p. 138-148.

Thélot C. (2003). Rapport n° 7 de l'avis du Haut Conseil de l'évaluation de l'école.

Drechsler M. (2005). Auteur - Base de ressources ENT libre « Iconito » pour les écoles,
http://demo.iconito.fr/index.php? module=ressource&desc=default&action=getSearchAdvanced&id=2
http://www.logiciels-libres-premierdegre-sceren.fr/article.php3?id_article=474
http://www.logiciels-libres-premierdegre-sceren.fr/IMG/ INDEXATION_DE_RESSOURCES_POUR_LES_ECOLESVersion2.pdf.

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Avril 2007

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