« Un nouveau contrat pour l'École »

Commentaires EPI des décisions du Ministre [1]
 

A - CLARIFIER LES MISSIONS, RENFORCER L'ADHÉSION

· Décisions 1/37/3/38 (objectifs à la sortie de l'école et du collège, savoirs essentiels, acquis de base)

Pour ce qui concerne l'école élémentaire :

     L'enfant doit être familiarisé avec l'ordinateur et les Technologies modernes. Dès l'école primaire, il faut donner à l'informatique pédagogique un rôle moteur dans les apprentissages fondamentaux. L'enfant doit ainsi avoir la pratique de quelques logiciels pédagogiques et progiciels (traitement de texte) simples. Les apprentissages fondamentaux ne peuvent être limités à Lire-Écrire-Compter. Une certaine connaissance de l'informatique, de l'ordinateur et des technologies associées doit faire partie intégrante de ces apprentissages fondamentaux.

Pour ce qui concerne le collège :

     Commencé dès l'École élémentaire, l'éveil technologique doit être poursuivi au collège. On ne se limite pas à des manipulations mécaniques, on aborde l'usage raisonné d'objets de plus en plus courants : programmateur, distributeur automatique, magnétoscope, minitel, imprimante...

     L'élève doit avoir une idée précise de ce qu'est un équipement informatique pour son usage personnel : les différents éléments qui le constituent, ses possibilités, ses limites.

     Il doit avoir acquis un certain nombre de compétences dans l'utilisation de logiciels standards :

  • il est autonome en matière de gestion de fichiers simples,

  • il a une certaine maîtrise des principales fonctionnalités d'un traitement de texte, en vue de la création d'un texte bien écrit et bien présenté,

  • il a une bonne maîtrise du clavier,

  • il connaît l'existence des aides à l'écriture,

  • il a une certaine maîtrise - qui sera complétée au lycée - d'un tableur et de bases de données simples.

     Savoir faire-faire : le but n'est pas d'apprendre un langage de programmation pour lui-même, mais de comprendre comment on peut automatiser l'enchaînement de tâches simples dans un but précis (programmes de quelques instructions, commande de robots et d'interfaces...).

Conclusion

     L'ensemble de ces approches donne tout son sens à ce que l'on appelle le traitement de l'information et permet de comprendre la place croissante prise par l'informatique dans notre société. L'école et le collège doivent initier les jeunes aux moyens modernes d'information, non seulement sur le plan technique, mais aussi et surtout sur le plan intellectuel : rechercher l'information, la sélectionner en fonction des objectifs précis, l'analyser, la traiter, la communiquer... correspondent à des savoirs et savoir faire fondamentaux à l'aube du 21e siècle. Cette initiation se poursuivra et s'approfondira au lycée dans le cadre des différentes disciplines et dans des enseignements spécifiques fédérateurs.

· Décision 136 (les enseignants associés à l'élaboration des programmes et à la définition des épreuves d'examen)

     Priorité doit être donnée à l'intégration de l'informatique et des technologies associées dans les différentes disciplines, ce qui n'exclut pas des enseignements plus spécifiques (en technologie au collège, option informatique au lycée...).

     Nous apprécions le souci d'associer les enseignants à l'élaboration des programmes et à la définition des épreuves d'examen. L'EPI est prête à compléter ses propositions d'introduction et de développement des Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication (NTIC) dans les programmes des différentes disciplines et dans les validations des connaissances.

     Des problèmes urgents ne sont pas résolus, notamment l'usage des calculatrices et des ordinateurs de poche (dont les dimensions rejoignent celles des calculatrices) dans les examens et les concours.

· Décision 54 (consolidation des méthodes)

     Là aussi, la place légitime des nouvelles technologies (NT) est à définir. Elles peuvent intervenir efficacement dans la consolidation des méthodes de travail des élèves (voir par ailleurs la décision 58). Il sera fait appel aux usages personnalisés de « produits pédagogiques » variés sous la responsabilité d'adultes (enseignants, moniteurs, parents...).

· Décision 117 (continuité école, collège, lycée)

     Cette continuité doit concerner tout particulièrement la maîtrise progressive de l'ordinateur et des technologies associées (CD-ROM, multimédias...) tout au long de la scolarité. Le niveau et le type d'approche devront être adaptés au niveau des élèves.

· Décision 95 (IHEEN)

     L'EPI est prête à contribuer, par ses réflexions et ses publications, aux travaux de l'Institut des Hautes Études de l'Éducation nationale.

· Décision 96 (image des enseignants)

     Il est de la responsabilité du Ministère de l'Éducation nationale de mettre en place des formations initiale et continue qui ne fassent pas courir le risque aux enseignants d'être largement dépassés par leurs élèves.

     Valoriser l'image de l'enseignant, c'est tout faire pour qu'elle soit aussi - aux yeux de leurs élèves - celle de la compétence dans le domaine des technologies nouvelles.

B - POUR LUTTER CONTRE L'INÉGALITÉ, PRIORITÉ AU FONDAMENTAL

· Décisions 2/41/6/5 (maîtrise de la langue, apprentissages fondamentaux, méthodes de travail, observatoire national)

     Nul doute que les NTIC peuvent contribuer efficacement à ces priorités légitimes. Comme le souligne Francis Balle : « l'écran, à l'égal du texte imprimé, est un allié du texte écrit » (VALEURS, mai-juin 1994).

     Les traitements de texte simples et des logiciels pédagogiques adaptés existent, ils ont déjà fait leur preuve dans un nombre important de situations dans lesquelles ils permettent notamment de lutter contre certains blocages (écriture, lecture) et apporter des motivations liées à l'intérêt des textes lus et écrits (cf. journal de la classe, par exemple).

     Les formations initiale et continue des enseignants doivent tenir compte des expériences et pratiques accumulées au cours des années. Des acquis existent qu'il reste à faire fructifier.

· Décisions 11/40/31/55 (méthodes de travail, apprendre à apprendre, aide au travail personnel, autonomie)

     Les méthodes de travail doivent intégrer - en cette fin de siècle - une certaine familiarité avec l'ordinateur et les technologies associées.

     « Apprendre à apprendre » doit notamment signifier l'acquisition de méthodes permettant d'exploiter de façon raisonnée l'information disponible dans les ordinateurs (à terme, multimédias), et les possibilités offertes par les logiciels (progiciels, didacticiels).

     L'autonomie doit comprendre : savoir utiliser l'ordinateur et ses périphériques (savoir brancher, détecter les dysfonctionnements simples...), être capable de construire son jugement sur un produit logiciel (répond-il à ses besoins ? faut-il rechercher mieux ?...).

     De telles compétences ne pourront être acquises sans l'aide d'enseignants formés.

· Décision 7 (langues vivantes à l'école élémentaire)

     À terme, le multimédia s'imposera pour atteindre de tels objectifs, mais cette technique impose, parallèlement, la formation des enseignants.

     L'utilisation du multimédia nécessite en effet un public très motivé (formation d'adultes par exemple), elle peut être un échec dans un contexte scolaire qui ne disposerait pas d'enseignants formés.

C - ACCUEILLIR ET PROMOUVOIR LA DIVERSITÉ

· Décisions 14/19/25/27/28/57 (difficultés scolaires, handicaps, remise à niveau individualisée, parcours diversifiés, dispositifs pédagogiques différenciés)

     L'ordinateur et les logiciels pédagogiques adaptés, à terme le multimédia, sont dans ces différents domaines des apports précieux : approches différenciées, aides individualisées, remises à niveau, aides adaptées aux élèves en difficulté... De nombreuses pratiques en témoignent. Un recensement exhaustif devrait précéder toute expérimentation.

     Il convient de réhabiliter les tutoriels et exerciseurs dans chaque discipline et pour tous les niveaux ; leur impact pédagogique ne manque pas d'intérêt et d'efficacité, dans les domaines cités.

     Là comme ailleurs une recherche pédagogique active et proche du terrain est indispensable. Elle se situe en amont de la conception et de la réalisation des programmes audiovisuels et de logiciels pédagogiques français de qualité.

· Décision 43 (option technologique)

     Une option technologique renforcée en 3ème permettrait notamment de mettre à niveau la culture en informatique (au sens large du terme) des élèves avant leur entrée au lycée (cf. par ailleurs, décision 58).

· Décisions 29/46/49/62 (information des élèves)

     L'information des élèves sur les voies et les métiers doit résolument exploiter les ressources de l'informatique, de la télématique et du média.

· Décision 58 (option informatique)

     Nous approuvons la création, dès la rentrée 1994, d'une option informatique dans les lycées répondant à la demande des élèves et des familles.

[voir Revue EPI n° 74, p. 25, 52, 53 à 67 et Éditorial du n° 75].

     À terme, l'EPI souhaite un enseignement de l'informatique et des technologies de l'information et de la communication pour tous les élèves de seconde, suivi d'options diversifiées en première et en terminale.

· Décisions 59/60 (salle multimédia, EAD)

     Sous réserve des conditions énumérées précédemment : nécessité d'un encadrement pédagogique par des enseignants formés à l'utilisation de cette technique et de produits pédagogiques de qualité, cette décision représente une ouverture de l'enseignement vers l'avenir.

     À plus long terme, tout porte à croire que le système éducatif devra faire résolument appel aux technologies modernes notamment pour démultiplier ses possibilités et faciliter les auto-apprentissages.

     L'urgence est grande d'encourager la production française et de stimuler les équipes en place (CNDP, CNED, CNAM, laboratoires universitaires...).

     La réflexion doit inclure celles sur les réseaux de communication et sur la chaîne de la connaissance.

· Décisions 71/76/86 (formation professionnelle)

     Les LP et la formation professionnelle sont directement concernés par les NTIC qui imprègnent dès maintenant tous les métiers et sont génératrices d'emplois. Les programmes d'enseignement doivent continuer d'évoluer en conséquence. Les enseignants doivent être formés.

D - UNE NOUVELLE POLITIQUE DE GESTION FAIRE CONFIANCE AU TERRAIN

· Décisions 112/53/87/91/ajout p. 22 (communication, valorisation des réussites pédagogiques, démarches innovantes, expériences)

     Un expérience très riche existe - s'enracinant dans les années 70 et même avant pour l'enseignement technique - pour ce qui concerne l'utilisation de l'informatique et des technologies nouvelles en général, dans toutes les disciplines et dans tous les ordres d'enseignement. De très nombreuses recherches liées à des pratiques du terrain ont été et sont menées (INRP, IREM, CNAM, CNRS, Directions pédagogiques...).

     De nombreuses publications (dont la Revue et les dossiers de l'EPI) en témoignent. Ces démarches innovantes actuelles sont néanmoins insuffisamment connues et répertoriées. Ce serait une priorité que de le faire.

     Un encouragement à l'innovation est indispensable. Il doit venir du plus haut niveau (Ministre) et être relayé par les Recteurs, les corps d'inspection, les conseillers pédagogiques et les formateurs académiques.

· Décisions 143/21 (nouveaux modes d'évaluation)

     L'évaluation doit permettre de s'assurer que les enseignants ont acquis une certaine maîtrise de l'ordinateur, et des technologies nouvelles en général, à l'issue de leurs formations initiale et continue.

· Décisions 23/147/148/24/155 (formations, réalités du futur métier, cahier des charges, besoins et cohérence, amélioration de la qualité)

     Un effort important est à faire pour intégrer l'informatique et les technologies nouvelles dans les formations initiale et continue des maîtres. Il faut faire évoluer d'urgence le cahier des charges des IUFM en prenant appui sur les académies dont la réflexion est la plus avancée.

     L'EPI peut également ici faire des propositions (cf. le texte adressé à la DESUP : Revue n° 65, p. 53 à 58).

· Décisions 107/18/101 (réseaux)

     Le réseau informatique est de nature à faciliter les liaisons entre établissements, enseignants, élèves, collectivités...

E - L'AVENIR AU PRÉSENT

· Décision 45 (initiation à l'image...)

     L'initiation à l'image (sa lecture, mais aussi sa création) est nécessaire, mais tout aussi indispensable est l'initiation à la recherche, au traitement, à la communication d'informations (texte, image, son...) grâce à l'ordinateur et aux technologies associées (CD-ROM, multimédia).

     L'élève doit avoir une certaine maîtrise de l'outil audiovisuel, mais aussi des outils informatiques, qui, à terme, tendront à fusionner.

· Décision 127 (équipement des établissements)

     L'EPI souscrit sans réserve à une telle décision en regrettant qu'elle ne soit pas datée. L'équipement des établissements, ce n'est pas seulement celui des salles spécialisées ; il est nécessaire d'envisager également des matériels reliés en réseaux à la disposition des enseignants et des élèves dans chaque salle pour des usages collectifs.

· Décision 128 (production de programmes éducatifs)

     Nous comprenons « programmes éducatifs » au sens large du terme : programmes audiovisuels et logiciels. Nous rappelons ici notre proposition d'un Atelier National Logiciel (ANL) volet logiciel d'un projet global de développement des technologies nouvelles dans le système éducatif (déclaration de l'Assemblée générale EPI, 1990).

· Décision 129 (droit d'usage)

     Ceci devrait également concerner les logiciels pédagogiques. Des logiciels datant de quelques années (certains de la période IPT) seraient encore utiles à condition qu'ils soient adaptés aux machines actuelles. Ce travail, tout à fait réalisable, compte tenu des compétences et des moyens de développement disponibles, incombe au Service public.

· Décision 130 (chaîne de la connaissance)

     Les enseignants et futurs enseignants doivent pouvoir trouver sur cette chaîne des supports d'autoformation (cf. par ailleurs).

· Décision 100 (collectivités territoriales)

     Les équipements nécessaires doivent comprendre les matériels audiovisuels et informatiques modernes et leur liaison en réseau ; cet effort devant être poursuivi sur plusieurs années dans le cadre d'une politique globale se développant dans la durée. Des cahiers des charges doivent être établis, liant l'État et les collectivités territoriales.

· Décision 109 (rôle de la Centrale)

     Il convient de lancer, dans la concertation, une large réflexion collective et prospective : de puissants moyens technologiques seront progressivement accessibles au grand public. Il y a là un risque d'inégalité que l'école se doit de compenser.

Paris, le 15 septembre 1994

Paru dans la  Revue de l'EPI  n° 75 de septembre 1994.
Vous pouvez télécharger cet article au format .pdf (146 Ko).

NOTES

[1] L'ensemble des décisions a été largement diffusé dans les établissements scolaires ; ces décisions sont également consultables sur 3614 EDUTEL.

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