ÉDITORIAL
 

François Bayrou, Ministre de l'Éducation nationale a pris, en juillet dernier, 158 décisions pour "un nouveau contrat pour l'école". L'EPI a activement participé aux concertations préliminaires ; nous avons écrit par deux fois au Ministre et adressé plusieurs notes à son cabinet (voir n° 74 de la Revue EPI, page 52).

Le moins que l'on puisse dire est que nous restons sur notre faim. Il y a tant à faire pour mettre l'école en phase avec son temps ! Nous publions en rubrique "Documents" une lecture EPI des décisions qui nous concernent plus particulièrement. Dans nombre d'entre elles nous voyons l'amorce d'une ouverture vers les technologies nouvelles qui reste à concrétiser.

Nous allons faire parvenir cette analyse aux Députés et Sénateurs qui avaient bien voulu répondre à nos précédents courriers, en leur demandant leur soutien au cours des débats annoncés devant les Assemblées.

Arrêtons-nous ici sur les décisions impliquant explicitement l'informatique, l'audiovisuel, le multimédia et la chaîne de la connaissance.

Pour ce qui concerne la création d'une option informatique des lycées, nous avons approuvé la proposition 58, puis la décision dès qu'elle a été rendue publique. Elle correspond en effet à la demande de l'association plusieurs fois renouvelée, notamment par l'Assemblée générale 1993 (Revue EPI n° 72, page 5). Etant bien entendu, qu'à terme, l'EPI souhaite un enseignement de l'informatique et des technologies de l'information et de la communication pour tous les élèves de seconde, suivi d'options diversifiées en première et en terminale.

Au moment où nous écrivons ces lignes, la situation est pour le moins confuse. Alors que la décision n° 58 est noir sur blanc (et sur vert !) dans les publications du MEN à destination du grand public (brochure "Tout sur la nouvelle école") et des enseignants, la DLC interrogée répond qu'il ne s'agit pas d'une option mais d'une expérimentation, dans 7 lycées, d'un enseignement de l'informatique pour les élèves de seconde. Il n'y avait pourtant rien de contradictoire entre les deux démarches !

Il faut absolument que les responsables du Ministère expliquent clairement leurs intentions et leurs objectifs. Qu'ils disent pourquoi la décision 58 de création d'une option à la rentrée 94 n'a pas été appliquée mais remplacée par une expérimentation déjà en place depuis avril 1994 ! Bref, qu'il y ait une explication honnête et non quelque chose qui apparaît comme un tour de passe passe désorientant encore plus les enseignants, les élèves et les parents attachés à un tel enseignement.

Une telle explication serait particulièrement opportune au moment où l'UNESCO va rendre public un curriculum pour un enseignement de l'informatique dans le secondaire (cf. "Informations Générales").

Pour ce qui concerne les décisions 59 et 60 (salle multimédia et enseignement à distance) : sous réserve d'une définition par le Ministère de ce qu'il entend par "salle multimédia", d'un encadrement pédagogique par des enseignants formés à l'utilisation de cette technique en milieu scolaire, et de produits de qualité, cette décision peut représenter une ouverture de l'enseignement vers l'avenir. Nous aurons l'occasion d'y revenir plus longuement, notamment au cours de la prochaine Assemblée générale. Mais nous ne négligeons pas les risques de fuite en avant, alors que les matériels actuellement disponibles sont mal utilisés. Nous affirmons que l'installation d'une salle multimédia dans chaque lycée - même s'il s'agit d'une initiative non négligeable - sera loin de résoudre dans sa globalité le problème de l'appropriation de l'informatique pédagogique, et des technologies nouvelles en général, par le système éducatif.

En matière d'enseignement à distance, tout porte à croire que le système éducatif devra faire résolument appel aux technologies modernes notamment pour démultiplier ses possibilités et faciliter les auto-apprentissages. Il faut dès maintenant encourager le développement de produits pédagogiques français et stimuler les équipes en place. Il est nécessaire que la création et l'innovation s'appuient sur une recherche pédagogique dynamique soucieuse de réalisations concrètes.

La réflexion doit inclure les réseaux de communication et la chaîne de la connaissance qui doit voir bientôt le jour. Cette chaîne peut être une façon d'encourager le développement des technologies modernes dans le système éducatif. Les étudiants des IUFM, compte tenu de la carence actuelle en matière de formation dans ce domaine, nous semblent consti-tuer une cible privilégiée, sans oublier pour autant les enseignants en exercice, et donc l'ensemble des élèves et des étudiants. L'EPI, qui a déjà eu l'occasion de proposer des thèmes d'actions, a rencontré en juillet Jean-Marie Cavada, dans le cadre de la fédération ITEM-SUP dont elle est membre fondateur.

Sur tous ces développements, étroitement liés à l'évolution indispensable du système éducatif, l'EPI entend apporter, comme elle l'a toujours fait, sa participation à la réflexion collective.

Nous invitons tous les adhérents à nous faire parvenir leurs contributions à la préparation de l'Assemblée générale 1994.

Jacques LUCY, Président

Jacques BAUDÉ, Secrétaire général

Paris, le 27 septembre 1994

Paru dans la Revue de l'EPI n° 75 de Septembre 1994.

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(14 avril 2000)