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Sémantique et nouvelles de l'informatique
 

   Au collège, l'informatique figure dans les cours de Technologie et de Mathématiques. En seconde, l'enseignement de Sciences numériques et Technologie (SNT) concerne tous les élèves. Parmi les spécialités de la voie générale on a Numérique et sciences informatiques (NSI). Un Capes Numérique et sciences informatiques a été créé et la future agrégation sera en Informatique. Dans le même temps, au collège et au lycée, les élèves font des Mathématiques avec un professeur de Mathématiques. Continuité sémantique et cohérence. Reconnaissons que, pour les élèves et les parents et pas qu'eux, c'est plus simple pour s'y retrouver !

   Les créations de SNT et NSI sont bienvenues (ainsi que celle d'un concours général informatique). Dans les années 80, il y avait l'option informatique des lycées d'enseignement général, supprimée dans les années 90 alors qu'elle concernait 50 % des lycées et avait vocation à se généraliser. Et puis et puis... un cheminement chaotique de la discipline informatique dans le système éducatif avec, déjà, de multiples appellations : multimédia, Nouvelles technologies de l'information et la communication, TIC, numérique... Cette confusion sémantique est significative de quelque chose de profond : elle a à voir avec les résistances persistantes qui se sont manifestées contre l'enseignement de la discipline informatique. Cachez ce (gros) mot que l'on ne saurait voir ! Cet aparté étant terminé, quelques mots sur la discipline informatique en cette nouvelle année scolaire.

La formation des professeurs

   Mais, et ce n'est pas une nouvelle, il y a la formation des professeurs qui ne correspond toujours pas aux besoins. Dans un article intitulé « Université : la "start-up nation" a sacrifié la filière informatique », Martin Clavey nous décrit une situation plus qu'inquiétante [1]. Qu'on en juge.

   « En cette rentrée, les filières de l'informatique craquent de toutes parts. Les universités manquent d'enseignants, au point que certaines envisagent de fermer des formations dont les entreprises raffolent pourtant. Les écoles privées, elles, se sont jetées sur le « marché ». Depuis l'élection d'Emmanuel Macron, le numérique est sur toutes les lèvres, la « start-up nation » ne cesse de valoriser, dans ses discours, l'informatique comme discipline scientifique. À l'université, la réalité est tout autre. Alors que la filière croule sous les inscriptions, les moyens vont manquer, en cette rentrée, pour assurer convenablement les cours. Par manque d'enseignantˇeˇs-chercheurˇeuseˇs titulaires, des universités songent même à fermer des formations, au bénéfice de formations privées... Dans le même temps, «  Les acteurs socioéconomiques européens manquent de matière grise en la matière et ça nuit à leur compétitivité... »

   « Un peu partout, les difficultés pour accueillir les étudiantˇeˇs sont criantes... ». À Lille, « la situation est extrêmement tendue avec un manque de personnel permanent important... », « Il faut gérer la pénurie. »

   Et pour l'Éducation nationale : « Très attendu par le secteur, un Capes de "sciences numériques et sciences informatiques" a bien été créé par le gouvernement en juin 2020 (avant l'agrégation d'informatique dont le premier concours aura lieu en 2022), mais les moyens font tout bonnement défaut sur le terrain pour ouvrir des préparations à ces nouveaux concours. » Sombre perspective !

   Nombre de collègues essaient de compenser les carences du système.

   Signalons l'ouvrage Informatique et culture scientifique du numérique disponible en libre usage (lecture, réutilisation), permettant une initiation complète [2]. Et rappelons le manuel de référence Introduction à la science informatique pour les enseignants de la discipline en lycée, édité par le CNDP-CRDP de Paris avec le soutien de l'EPI et de l'ASTI et dirigé par Gilles Dowek. Il est en ligne sur SILO, licence Creative commons [3]. Des aides bienvenues pour les professeurs.

Les filles en informatique [4 ; 5 ; 6]

   Une situation préjudiciable qui demeure. La réforme du lycée n'y a rien changé. En 2020, les filles représentaient seulement 13 % des élèves de terminale dans la spécialité NSI contre 80 % en « Humanités, Littérature et Philosophie ». Malgré des résultats scolaires meilleurs que ceux des garçons, les filles restent très en retrait ou insuffisamment présentes dans les filières scientifiques, et industrielles et numériques. Pour le moins un paradoxe. L'égalité filles-garçons dans les choix d'orientation reste à conquérir.

Une alternative à Google

   Terminons sur une bonne nouvelle.

   L'on sait la problématique de la dépendance de la France et de l'Europe aux GAFAM [; 7]. Depuis des décennies, le combat est mené pour que les logiciels et les ressources libres aient la priorité dans l'Éducation nationale. L'EPI est partie prenante de ce combat. De nombreux textes dans EpiNet en témoignent. Le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche veut une alternative à Google pour les besoins des étudiants, enseignants et chercheurs. Il a contacté pour avis l'association Framasoft, pionnière du logiciel libre. À confirmer.

Jean-Pierre Archambault
Président de l'EPI

NOTES

[1] https://www.mediapart.fr/journal/france/140921/universite-la-start-nation-sacrifie-la-filiere-informatique?onglet=full

[2] https://raw.githubusercontent.com/ejazzfr/Inria-mooc-handbook/main/inria-mooc-web-2021-04-14.pdf

[3] https://wiki.inria.fr/wikis/sciencinfolycee/images/7/73/ Informatique_et_Sciences_du_Numérique_-_Spécialité_ISN_en_Terminale_S.pdf

[4] Les femmes, le logiciel libre, vous et moi aux RMLL 2010 ; Alexis Kauffmann, Jean-Pierre Archambault.
http://www.epi.asso.fr/revue/articles/a1010e.htm

[5] Quelles différences entre les filles et les garçons à propos de l'utilisation d'ordinateurs portables au collège ? Une étude de cas en France ; Solène Zablot, Georges-Louis Baron.
https://www.epi.asso.fr/revue/articles/a1901c.htm

[6] Le genre et le logiciel libre ; Jean-Pierre Archambault, Ayuko Sedooka, Georges-Louis Baron.
https://www.epi.asso.fr/revue/articles/a1010h.htm

[7] Des professeurs pour enseigner l'informatique, La dépendance par rapport aux GAFAM, La spécialité NSI, L'agrégation d'informatique ; Jean-Pierre Archambault.
https://www.epi.asso.fr/revue/articles/a2106a.htm

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Association EPI
Octobre 2021

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