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Un enseignement d'exploration :
« Informatique et création numérique »
 

   En cette rentrée 2015, au titre de second enseignement d'exploration, un nouvel enseignement d'une durée d'1h30 hebdomadaire est offert au choix des élèves en classe de seconde générale et technologique : « Informatique et création numérique » (ICN) [1]. Sa mise en place intervient de manière progressive et il appartient aux recteurs d'organiser la montée en charge de l'enseignement dans leur académie. Une sensibilisation à l'informatique et au numérique se fait jour dans le programme de maternelle. Le plan numérique sera déployé à la rentrée 2016. Il s'agira à la fois d'élever le niveau de compétences numériques des élèves et d'accompagner la généralisation des pratiques du numérique dans les classes et les établissements scolaires. Il s'appuiera sur la mise en oeuvre des nouveaux programmes et du socle commun de connaissances, de compétences et de culture, notamment dans les domaines de l'informatique et de l'éducation aux médias et à l'information, et il accompagnera la mise en oeuvre de la réforme du collège. Près de 600 établissements pionniers, 350 écoles et 220 collèges pilotes, préfigurent le plan numérique à la rentrée 2015 [2].

   On pourra consulter le programme d'ICN [3]. Les collègues intéressés trouveront des séries d'activités destinées aux élèves (ainsi qu'à ceux de terminale S (ISN)) sur le site informatiquelycée [4], portant sur les domaines suivants : réseau, base de données, développement web (client+serveur+développement jeux), Python...

   « L'ambition de cet enseignement d'exploration est d'amener les élèves de seconde à comprendre que leurs pratiques numériques quotidiennes sont rendues possibles par une science informatique rigoureuse... ». Cet enseignement remplit un double objectif : il s'agit de permettre aux élèves à la fois d'appréhender l'informatique dans sa dimension scientifique et de réfléchir aux enjeux de société qu'impliquent ses usages. Sa mise en oeuvre s'organise sous la forme de modules qui amènent les élèves à construire un projet en groupe aboutissant à une réalisation technique. Par cet enseignement, les élèves sont conduits à prendre conscience de la diversité des champs d'activité dans lesquels le numérique occupe une place de plus en plus déterminante [3].

   Le focus 11 du dossier sur la rentrée scolaire indique que cet enseignement « concerne toutes les disciplines enseignées, en mettant en valeur l'apport de l'informatique pour chacune d'entre elles. Ainsi, tout enseignant, quelle que soit sa discipline, peut avoir vocation à prendre en charge cet enseignement. » [5]. Le français ou les mathématiques concernent toutes les disciplines enseignées. Pour autant tout enseignant n'a pas vocation à prendre en charge le cours de français ou celui de mathématiques. Il y a pour cela des professeurs de français ou de mathématiques titulaires d'un Capes ou d'une agrégation. À quand un Capes et une agrégation d'informatique que l'EPI et d'autres ne cessent de demander ?

   Dans le Monde.fr du 25 juin 2015 [6], Sylvie Bonnet, présidente de l'Union des professeurs de classes préparatoires scientifiques, fait référence à l'inscription officielle, par le Conseil supérieur des programmes, de l'informatique dans le socle commun des programmes de collège, « l'élève devant connaître les principes des langages de programmation et être capable de réaliser des applications utilisant des algorithmes simples ». Elle rappelle qu'« en classes préparatoires scientifiques, les opérations ont été lancées il y a deux ans, à marche forcée. Dès la rentrée 2013, sous le pilotage des Grandes Écoles d'ingénieurs – désireuses de promouvoir l'informatique dans la formation de leurs futurs étudiants - et du ministère de l'enseignement supérieur, l'informatique a fait son entrée dans toutes les classes préparatoires scientifiques, avec un horaire dédié et des programmes allant de l'algorithmique aux bases de données en passant par l'acquisition d'un langage de programmation ». Mais se posait la question de savoir qui allait assurer ce nouvel enseignement ? En effet, précise-t-elle, « le ministère de l'Éducation nationale ne reconnaît pas l'informatique comme une discipline, et n'a pour ce domaine ni professeurs, ni dispositif de formation continue opérationnel, ni inspection générale, ni concours de recrutement, ni agrégation, ni certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré (CAPES). » Il a donc été décidé que les professeurs scientifiques déjà en poste en classes préparatoires allaient commencer par assurer seuls leur propre formation. Les Grandes Écoles ont mis sur pied des stages et mobilisé leurs propres enseignants-chercheurs pour assurer leur formation dans l'urgence. À la rentrée 2013, les difficultés de mise en oeuvre n'ont pas manqué, notamment de par le morcellement de l'enseignement induit par la pénurie d'enseignants compétents.

   Sylvie Bonnet rapporte que « les professeurs de classes préparatoires en ont acquis la certitude, si besoin était, au contact des enseignants-chercheurs des Grandes Écoles qui les ont formés : l'informatique et le numérique relèvent indiscutablement d'une pédagogie spécifique et la création d'un CAPES et d'une agrégation d'informatique est une nécessité. Il y faut des travaux en groupes, où des talents différents sont amenés à coopérer pour faire progresser chacun, des projets à construire et à faire aboutir, une pédagogie par essais-erreurs totalement nouvelle dans les apprentissages ».

   Se demandant où l'on en est aujourd'hui, elle mentionne « la création, non pas d'un CAPES informatique, mais de "mathématiques avec option informatique" annoncée pour... 2017, dans le plan Stratégie mathématiques de décembre 2014 ». Et, ajoute-t-elle, « à la rentrée 2016, les professeurs des collèges vont connaître, comme leurs collègues de classes préparatoires, les joies d'enseigner une discipline qui n'existe pas, sans référence pédagogique fiable, sans formation spécifique ».

   La mise en place d'ICN en cette rentrée constitue une avancée. Mais la formation des enseignants est, nous ne cesserons de le dire et le redire, essentielle à la réussite de cette ambition de donner à tous les élèves une solide culture générale informatique qui correspond aux besoins et enjeux de notre époque [7]. Et là, le compte n'y est pas. D'autant qu'il va falloir assurer des montées en charge. La ministre, lors de sa conférence de rentrée, a confirmé qu'un enseignement optionnel d'informatique sera ouvert en classe de première à la rentrée 2016 et que l'enseignement de spécialité optionnel de terminale S « Informatique et science du numérique » (ISN) sera parallèlement étendu, avec les adaptations de programme. Également à la rentrée 2016, au primaire, au CE1, les élèves seront initiés au codage (informatique) et à la culture digitale, cet apprentissage se poursuivant jusqu'au lycée. Au collège, cet enseignement sera confié aux professeurs de mathématiques et de technologie. S'il faut créer sans tarder ce Capes et cette agrégation d'informatique [8], d'autres mesures ont leur place, de manière plus ou moins transitoire : des Capes et agrégations bivalents, externes et internes, des listes d'aptitude, des habilitations du type de celles prévues pour les enseignants d'ISN et un renforcement de la formation continue. Et des certifications pour les professeurs des écoles dans les ESPE. Sans la mise en place dès cette rentrée de formations initiales et continues – trop longtemps différées – les dispositions annoncées seraient très difficilement applicables.

15 septembre 2015

Jean-Pierre Archambault
Président de l'EPI

NOTES

[1] Arrêté du 17-7-2015 - JO du 4-8-2015 - NOR MENE1517386A
http://www.education.gouv.fr/pid285/bulletin_officiel.html?cid_bo=91849

[2] http://cache.media.education.gouv.fr/file/DP_rentree/28/5/2015_rentreescolaire_fiche_11_ 456285.pdf

[3] http://cache.media.education.gouv.fr/file/31/94/3/ensel7386_annexe_455943.pdf

[4] http://informatiquelycee.olympe.in/

[5] http://cache.media.education.gouv.fr/file/DP_rentree/28/7/2015_rentreescolaire_fiche_11 focus_456287.pdf

[6] http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/06/25/l-informatique-et-le-numerique-pour-tous_ 4661676_3232.html#hTWV16AM3pXdwl1k.99

[7] Voir le communiqué de l'UPS du 9 juillet 2015 qui demande la création d'un bac scientifique http://www.capcampus.com/ecoles-d-ingenieurs-457/bac-2015-l-ups-demande-la-creation-d-un-bac-scientifique-a36002.htm

[8] Concernant l'enseignement technologique, on pourra consulter le programme de la session 2016 du Concours externe de l'agrégation du second degré, Section sciences industrielles de l'ingénieur. « Les épreuves de sciences industrielles de l'ingénieur pourront s'appuyer sur les programmes d'informatique ci-dessous. Le programme informatique 1 concerne les 3 options de l'agrégation SII ; le programme 2 est un complément pour l'option ingénierie électrique. »
http://cache.media.education.gouv.fr/file/agreg_externe/21/7/p2016_agreg_ext_sii_418217.pdf (pages 13 à 17).

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Septembre 2015

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