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Lettre ouverte SIF-EPI aux candidates et candidats
à la Présidence de la République
 

   L'habitude est désormais bien prise de s'adresser aux candidates et candidats à l'élection présidentielle pour connaître leur position sur telle ou telle question. C'est ce que fait à nouveau l'EPI, en compagnie de la SIF, pour ce qui concerne l'enseignement de l'informatique de l'école primaire aux classes préparatoires. À notre époque, l'informatique doit être une composante de la culture générale de tous les élèves et il est nécessaire qu'elle soit enseignée dès le secondaire par des professeurs titulaires d'un Capes ou d'une agrégation d'informatique à créer sans attendre. Qu'en pensent les candidats ?

   Vous trouverez ci-après la lettre ouverte que l'EPI et la SIF ont publiée et adressée aux différents candidates et candidats. Nous vous proposons de la faire largement connaître, notamment aux responsables locaux et aux parents d'élèves.

Le 15 janvier 2017

Jean-Pierre Archambault
Président de l'EPI

La Société informatique de France, SIF, et l'association Enseignement public et informatique, EPI, souhaitent interpeller et questionner les candidates et candidats à la Présidence de la République sur des enjeux sociétaux et éducatifs essentiels. Il est en effet indispensable de donner aux citoyens, et aux jeunes en particulier, la culture générale de leur époque, culture qui inclut désormais l'informatique. C'est l'avenir du pays qui est en jeu, tant sur le plan sociétal que sur les plans scientifique et économique. Mais, pour bien enseigner l'informatique, il faut des professeurs... d'informatique.

Tous les métiers sont impactés par le numérique

   Un récent rapport des Inspections générales plante le décor [1] : « Les impacts de la numérisation de l'activité concernent tous les secteurs d'activité, qu'il s'agisse des services (vente à distance, relation client, téléprocédures administratives), de l'industrie (industrie 4.0 et ses smart factories capables d'une plus grande adaptabilité dans la production), du bâtiment (domotique), des villes (villes intelligentes), des loisirs (streaming, réseaux sociaux), de l'activité culturelle (production musicale et cinématographique) ou de la santé (objets wearables et big data) pour ne citer qu'eux. » Tous les métiers sont, peu ou prou impactés, voire profondément transformés par l'introduction des outils numériques, sans parler des métiers dont le cœur est l'informatique. Ils constituent à l'heure actuelle, et pour de nombreuses années encore, un vivier important d'emplois [2].

L'informatique, science et technique, discipline scolaire

   Dans son projet de programme d'un enseignement facultatif d'informatique et création numérique (ICN) pour les classes de premières S, ES et L et de terminale ES et L [3], le Conseil supérieur des programmes (CSP) l'affirme : « L'acquisition d'une culture numérique construite sur des connaissances en informatique est indispensable (dans la société contemporaine). Il s'agit de préparer chacun à agir et à participer pleinement à la vie sociale, économique et culturelle. » Pour cela « bien plus que de capacités liées à l'usage des outils, il s'agit de maîtriser un certain nombre de notions afin de comprendre les logiques et les enjeux du traitement de l'information et de pouvoir décoder les processus à l'œuvre dans les algorithmes, les écritures et les systèmes complexes qui sous-tendent le fonctionnement de notre société ».

   L'informatique est donc bien appelée à devenir une discipline scolaire à part entière, afin que l'école puisse enfin pleinement assumer ses trois missions, former l'homme, le travailleur et le citoyen. Il faut assurer à chaque jeune une chance égale de devenir un citoyen éclairé, de construire son avenir, et de trouver sa place dans une société devenue numérique. Les enjeux économiques sont d'importance. Et l'omniprésence de l'informatique dans notre environnement bouleverse notre vie quotidienne ; la compréhension de ses fondements est de plus en plus nécessaire pour exercer au mieux sa citoyenneté (loi Hadopi, neutralité du Net, cybersécurité...).

Le problème essentiel de la formation des enseignants

   Depuis la rentrée 2016, l'introduction de l'informatique à tous les niveaux du système scolaire se heurte à un problème de taille : le déficit persistant de formation en informatique des professeurs. Alors que l'informatique apparaît dans les programmes de l'école primaire et du collège, et se renforce par le biais d'enseignements optionnels au lycée, les enseignants se retrouvent devant le fait accompli, avec quelques heures de formation en tout et pour tout. L'enseignement de spécialité de Terminale S « Informatique et sciences du numérique » (ISN), créé en 2012, est également freiné dans son déploiement. En effet, le vivier des professeurs volontaires pour l'enseigner est quasiment épuisé ; de plus, l'investissement de ces enseignants est extrêmement mal reconnu. Ainsi, bien que la nécessité d'un enseignement de l'informatique pour tous soit maintenant une évidence, les moyens pour atteindre cet objectif ne sont pas déployés. Le message de l'Académie des sciences L'enseignement de l'informatique en France – // est urgent de ne plus attendre publié en mai 2013 reste malheureusement toujours d'actualité [4].

   Deux évolutions parallèles appellent des modifications profondes dans la formation des enseignants : d'une part, la généralisation des enseignements de l'informatique, comprenant son aspect de science et de technique ; et, de l'autre, les nouvelles pratiques pédagogiques exploitant la pensée informatique et les outils numériques. Pour répondre à la première, c'est une discipline informatique à part entière qui doit être créée, et dotée naturellement de concours de recrutement adéquats, à savoir un Capes et une agrégation d'informatique. Pour accompagner la seconde, afin de permettre aux enseignants de maîtriser les outils numériques et de faire évoluer leur pratique, les Écoles Supérieures du Professorat et de l'Éducation (ESPE) doivent s'emparer de la question à bras le corps, en proposant à tous les enseignants du primaire et du secondaire des formations et certifications attestant d'une qualification en informatique.

   La Société informatique de France et l'association Enseignement public et informatique souhaitent connaître vos propositions concernant ces importantes problématiques, notamment :

  • La nécessité de réussir le déploiement d'un enseignement de l'informatique pour tous les élèves, de l'école primaire aux classes préparatoires, dans les formations générales, techniques et professionnelles.

  • La nécessité de reconnaître l'informatique comme discipline scolaire de culture générale à part entière, et son corollaire, la création des concours idoines Capes et agrégation d'informatique.

  • La nécessité de développer des formations à l'informatique et à ses usages pédagogiques dans les différentes disciplines pour tous les enseignants.

http://www.epi.asso.fr/revue/editic/lettre_epi-sif_1701.htm

NOTES

[1] Les besoins et l'offre de formation aux métiers du numérique, Inspection générale des affaires sociales, Inspection générale de l'éducation nationale, Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche, Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies, février 2016.
http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid1Q1306/les-besoins-et-l-offre-de-forrnation-aux-metiers-du-nurnerique.html

[2] La Commission européenne prévoit une vacance de postes élevée et ciblée à l'horizon 2020. La pénurie de cadres en informatique, notamment en Europe, est problématique. L'informatique, science majeure du XXIe siècle, et les sciences du numérique représentent une part importante de la R&D de par le monde, de l'ordre d'un tiers.

[3] Projet de programme pour un enseignement facultatif d'informatique et de création numérique, publication du Conseil supérieur des programmes, avril 2016.
http://www.education.qouv.fr/cid100901/projet-de-programme-pQur-un-enseignement-facultatif-d-informatique-et-de-creation-numeriaue.html

[4] L'enseignement de l'informatique en France - II est urgent de ne plus attendre, Rapport de l'Académie des sciences, mai 2013. http://www.academie-sciences.fr/pdf/rapport/rads0513.pdf

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Janvier 2017

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