L'open source au Maroc : quelles perspectives ?

Rachid Amimi
 

   Au Maroc, parmi les logiciels libres, c'est Linux qui est le plus répandu. Les bénéfices recherchés du logiciel libre sont principalement la sécurité et le coût d'implémentation. En effet, même si libre ne signifie pas gratuit, les produits libres sont significativement moins chers.

   La discussion autour de la question sur le libre commence au Maroc à faire réagir les décideurs de tous bords. Le ministre des Finances bascule les installations informatiques de ses départements vers les logiciels libres. Les autres ministères devraient en faire autant. Mais c'est dans l'enseignement où le choix sera décisif compte tenu des enjeux, à savoir la démocratisation de l'outil informatique et la réduction de la fracture numérique.

   Au Maroc, on prend son temps avant de surfer sur la vague du libre. Tout en faisant la part des choses, il faut dire que la Linux Party de l'EMI en 1999 a été le premier événement dédié à la promotion des logiciels libres dans le pays. À l'époque, cela relevait surtout de la curiosité informatique. Il n'y avait pratiquement aucune utilité d'avoir un ordinateur personnel tournant sous Linux, à part celle d'avoir un environnement Unix sur PC. D'une simple Install Party, l'événement s'est transformé en une rencontre annuelle nationale des acteurs des logiciels libres au Maroc.

   Il n'est pas du tout aisé d'avoir une vue d'ensemble sur le secteur, et de faire une analyse précise, tant les données chiffrées manquent cruellement, et que les entreprises restent plutôt discrètes sur les solutions adoptées en interne. Mais on peut cependant observer une adoption massive de certaines technologies libres (Java, LAMP, les briques open sources en JEE...), non pas pour des raisons idéologiques, mais bien parce que la fiabilité et la pérennité de ces solutions n'est plus à démontrer. Et en ces temps de crise, les entreprises cherchent surtout à faire des économies sur les prix de licences, et accorder un peu plus de budget pour l'intégration et la formation. L'offre des SSII marocaines en matière de libre n'est pas pléthorique. Cependant, petit à petit, elle commence à s'étoffer pour répondre à une demande de plus en plus croissante des entreprises. Des SSLL (Société de Service en Logiciels Libres) commencent à voir le jour. Elles mettent surtout en avant le coût compétitif de leurs solutions pour faire face à la concurrence.

   Sur le volet de l'éducation, point noir il y a encore quelques années, la situation s'améliore grandement. Les écoles d'ingénieurs poussent fortement leurs étudiants à maitriser un minimum de technologies libres à travers l'organisation des concours pour les étudiants des grandes écoles, afin qu'ils réalisent des projets à base de l'open source. Et puis, il y a chaque année à Casablanca la journée du logiciel libre (Software Freedom Day). L'édition 2010 aura lieu le samedi 18 septembre. Pour prendre connaissance de l'événement et pour s'inscrire :
http://www.systemum.com/sfd/.

   Cela étant, le volet politique reste très en retard sur le reste. Dans tous les pays ayant connu une adoption massive des logiciels libres, l'impulsion est surtout venue de l'État. Cela s'est fait en accordant des subventions ou des avantages fiscaux aux entreprises adoptant les solutions libres, en poussant les administrations publiques à s'équiper en logiciels libres, et en finançant la recherche scientifique dans le domaine. Or, force de constater, que rien de cela n'a été fait au Maroc. Pire, dans la récente stratégie Maroc Numeric 2013 adoptée par le Département des Technologies de l'Information, il n'y a aucune mention du rôle ou de la promotion de l'utilisation des logiciels libres pour la mise en oeuvre de cette stratégie. Autant dire que le développement de l'utilisation du libre au Maroc devra se faire sans l'impulsion de l'État.

   Les prochaines années restent cependant prometteuses pour le libre. Les solutions open source se sont banalisées. Le recours de plus en plus prononcé au cloud computing, favorisera certainement l'adoption de standards ouverts et d'infrastructures basées sur des logiciels open source. L'aventure ne fait donc que commencer.

Rachid Amimi.
Technicien spécialisé en développement informatique
amimi.ma@gmail.com

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Association EPI
Septembre 2010

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