L'EIAO de langues :
quelques réflexions

Odile Blanvillain
 

I. À LA CROISÉE DES CHEMINS

     Nous nous proposons ici d'examiner quelques systèmes développés en 'Enseignement Intelligemment Assisté par Ordinateur' (EIAO) dans le cadre de l'enseignement/apprentissage des langues. Ce domaine nous paraît posséder une place à part en EIAO, du fait de sa spécificité face aux disciplines dites 'scientifiques', telles les mathématiques ou la physique. Il nous a paru intéressant d'étudier les résultats en la matière et d'essayer d'en dégager les tendances et les caractéristiques particulières.

     L'EIAO de langues se situe à la croisée de plusieurs disciplines et de domaines de recherche : l'EIAO [1] et l''Intelligence Artificielle' (IA) [2], les techniques de traitement automatique du langage [3], les recherches cognitives sur l'apprentissage, la pédagogie et la didactique des langues.

     Nous commencerons par rappeler quelques notions centrales pour comprendre la structure des systèmes d'EIAO. Nous ne développerons pas ici les différents types de représentation informatique des données linguistiques (grammaires, lexiques), ni les différentes techniques d'analyse d'énoncés [4], ce qui dépasserait, bien entendu, largement les limites de cet article. Cependant, nous aborderons ces points au fur et à mesure de l'étude de chaque système, quand ils éclairent le fonctionnement du système présenté et quand ils apparaissent compréhensibles avec un minimum de connaissances techniques à leur sujet.

     Notre étude proprement dite, centrée sur quatre systèmes choisis pour leur caractère représentatif, portera sur les types d'activités qu'ils proposent, sur leur organisation interne et leur mode de fonctionnement en ce qu'il reflète une approche particulière de l'enseignement / apprentissage des langues, sur leur traitement des erreurs et les types de commentaires qu'ils proposent. Nous nous intéresserons également à l'interface apprenant-système lorsqu'elle présente des particularités notables.

     Cette étude nous permettra de mettre en évidence, dans une perspective constructive, les caractéristiques et les carences que nous avons observées dans ce domaine, principalement en ce qui concerne son approche pédagogique et didactique de l'enseignement des langues.

II. RAPPELS SUR LA STRUCTURE DES SYSTÈMES D'EIAO

     Notre rappel terminologique portera sur les tuteurs intelligents car plusieurs des systèmes étudiés en font partie. De plus, la structure définie pour les tuteurs a grandement influencé l'ensemble du domaine.

     Ce que nous présentons ici ne constitue, bien entendu, qu'un résumé devant faciliter la suite de la lecture. Il correspond à la structure idéale d'un tuteur intelligent, structure rarement mise en oeuvre dans son intégralité dans un produit opérationnel. Nous n'insisterons pas sur les faiblesses des réalisations actuelles dans le domaine de l'EIAO en général, faiblesses reconnues par nombre de chercheurs [5].

     Un tuteur intelligent est un ensemble de modules qui communiquent entre eux. Ces modules sont chargés de l'expertise du domaine (cf. II. 1), de l'encadrement pédagogique (cf. II. 2), du diagnostic des erreurs de l'apprenant et de la mise à jour du profil de ce dernier (cf. II. 3). Ils communiquent avec l'apprenant par l'intermédiaire de l'interface (cf. II. 4).

1. Le module expert

     Le module expert fournit leur qualificatif aux tuteurs 'intelligents'. Le système, grâce à ce module, doit être capable de résoudre les problèmes qu'il propose aux apprenants, et éventuellement, d'utiliser son raisonnement pour leur donner des explications [6].

2. Le module pédagogue

     Le module pédagogue a pour rôle de déterminer l'activité à proposer à l'apprenant et de gérer l'interaction avec ce dernier.

     Le choix de l'activité à proposer doit se faire en fonction des objectifs pédagogiques de la session [7], du profil de l'apprenant (les informations concernant le profil de l'apprenant sont contenues dans le modèle de l'élève, cf. II. 3), et bien entendu, des ressources et des contraintes du système (les exercices [8] disponibles, dans le cas - fréquent - où le système ne contient pas de générateur automatique).

     Gérer l'interaction signifie définir quand intervenir, sur quel point intervenir, et pour finir, quel type et quelle quantité d'information fournir en commentaire. Le module pédagogue peut suivre différentes stratégies (opportuniste, planifiée ou mixte) selon que l'on veut profiter de toutes les occasions pour présenter de nouveaux points, que l'on préfère suivre une progression bien définie, ou encore que l'on accepte quelques digressions ponctuelles dans la progression.

     Le module pédagogue décide ainsi qui, de l'apprenant ou du système, a l'initiative du déroulement de la session, envoie des instructions à l'interface qui, à son tour, envoie les messages correspondants à l'écran.

3. Le modèle de l'élève [9] et le diagnostic cognitif

     L'intégration d'une représentation de l'apprenant au sein du système devrait permettre une parfaite individualisation de l'enseignement/apprentissage. Idéalement, le système serait capable de recueillir et d'utiliser des informations telles que :

  • l'état des connaissances procédurales de l'apprenant (ce qu'il sait faire),

  • l'état de ses connaissances déclaratives (les notions et concepts qu'il connaît),

  • ses particularités individuelles (sa réaction aux différentes stratégies proposées, son intérêt pour les différents types d'exercices, etc.),

  • son niveau et son évolution (c'est ce que l'on appelle le 'profil de l'élève', qui est déterminé grâce à la trace de ses actions et de ses résultats au cours du déroulement de la session).

     Le modèle de l'élève n'a pas encore répondu aux espérances qu'il avait fait naître, du fait de la difficulté à recueillir et à exploiter ce type d'informations. On voit, en effet, immédiatement les problèmes théoriques et pratiques que cela soulève [10].

     Le diagnostic cognitif doit permettre le traitement des erreurs, qui peut se faire selon différents modèles. Nous ne présenterons pas ici les multiples facettes du modèle de l'élève et du diagnostic des erreurs, présentées dans la littérature spécialisée à laquelle nous renvoyons le lecteur (cf. Wenger 87). Nous verrons, dans la suite de notre étude, les problèmes spécifiques à l'EIAO de langues.

4. L'interface

     L'interface est le lien physique entre l'apprenant et le système. Les débuts de l'EIAO s'étaient caractérisés par l'utilisation d'interfaces en 'langage naturel' [11], ou souvent en pseudo-langage naturel [12]. Une véritable interface en langage naturel demanderait un outillage extrêmement puissant [13], comprenant : un module d'analyse (pour la compréhension des messages de l'apprenant), un module de génération (pour la production des messages de rétroaction) et un module de gestion de dialogue, prenant en compte les indications du module pédagogue.

     On comprend que devant l'énormité de la tâche, certains systèmes d'EIAO actuels préfèrent une interface WIMP [14], utilisant la souris, les menus déroulants, les fenêtres multiples et les icônes.

III. LE SYSTÈME XTRA-TE

     Le système XTRA-TE (English Chinese Sentence TRAnslator to Teach English) a été développé par Li Chen et Barry L. Kurtz autour d'un système de traduction automatique chinois-anglais (XTRA).

1. LES ACTIVITÉS PROPOSÉES À L'APPRENANT

     Le système s'adresse à des étudiants de langue maternelle chinoise, qui apprennent l'anglais. Les activités proposées sont de trois types : le thème (l'apprenant doit traduire en anglais la phrase en chinois proposée par le système), la composition dirigée (l'apprenant doit construire une phrase en anglais à partir d'un ensemble de mots donnés), et la composition libre (l'apprenant peut proposer une phrase en anglais en utilisant son propre vocabulaire).

     Notons que toutes les activités proposées sont limitées au cadre d'une phrase, qu'elle soit à traduire, à former à partir d'un vocabulaire donné ou composée librement. Sans prendre en compte les activités communicatives, la contextualisation est une notion qui a été reconnue comme importante, tant en linguistique qu'en didactique des langues. Cependant, nombre de systèmes d'EIAO continuent à prendre la phrase hors-contexte comme l'unité de travail de base, certainement du fait des limites des outils utilisés [15] : des analyseurs de phrases. Il nous semble dommage que les contraintes techniques doivent prendre le pas sur l'intérêt didactique et pédagogique des activités proposées.

2. Le module expert

     Le module expert de XTRA-TE correspond au système de traduction automatique XTRA. Celui-ci contient une grammaire de l'anglais et du chinois (500 règles [16]), ainsi que des dictionnaires (7 000 mots anglais, 10 000 signes chinois).

     Dans le cas d'un exercice de type traduction, le module expert génère une solution correcte et compare la solution proposée par l'apprenant à la sienne.

     Dans le cas d'un exercice de type composition, il analyse la phrase produite par l'apprenant et détermine sa validité syntaxico-sémantique. Comme tout analyseur syntaxique classique, XTRA s'arrête lorsqu'il trouve une erreur (ou du moins ce qu'il considère comme tel par rapport aux règles qu'il connaît). Le traitement des erreurs, nécessaire dans un système d'enseignement, est effectué à part (cf. III. 5).

3. Le modèle de l'élève

     Le niveau de compréhension de l'apprenant est mesuré par un niveau de connaissance de la notion grammaticale présentée, divisé en quatre degrés : 'pas connu', 'vaguement connu', assez bien connu', 'très bien connu'. La détermination de ce niveau se fait en fonction du comportement de l'apprenant au cours des exercices.

     Le modèle de l'élève a la charge de l'évaluation de ce niveau de connaissance. Son rôle est également de garder un historique de l'activité de l'étudiant.

4. Le tuteur

     Le module sélectionne la stratégie pédagogique appropriée en utilisant l'information venant du modèle de l'élève. Ce qui signifie concrètement que si l'apprenant connaît bien le matériau étudié, le tuteur lui proposera des exercices difficiles, tandis que s'il ne le connaît pas, il recevra une leçon de présentation préalable. Le tuteur décide également du type de correction qui sera donné (cf. III. 6).

     Le système ne possède pas de générateur d'exercices. Les exercices à proposer selon les niveaux repérés sont écrits et entrés par les auteurs.

5. Le traitement des erreurs

     Nous avons vu que la réponse de l'apprenant est traitée par l'analyseur de XTRA. En cas d'erreur, celui-ci est incapable de continuer l'analyse. Le traitement de l'erreur se fait alors par relâchement des contraintes [17] selon plusieurs niveaux. Les contraintes sémantiques sont relâchées les premières. Si l'analyse ne peut toujours pas être complétée, ce sont les contraintes syntaxico-morphologiques qui sont levées. En dernier lieu, les deux types de contraintes sont relâchés simultanément.

     Ainsi [18], la phrase 'Le chien parle à son maître' ne devrait pas être accepté au premier tour s'il existe dans l'analyseur une règle qui précise que 'parler' demande un sujet humain. Si on lève cette contrainte, la phrase - syntaxiquement correcte - sera acceptée. De même, la phrase 'Le chien est méchante' ne sera pas acceptée au premier essai de l'analyseur (où toutes les contraintes sont maintenues). Au deuxième tour, il lèvera les contraintes sémantiques et la phrase ne pourra toujours pas être acceptée. L'analyseur relâchera alors les contraintes syntaxico-morphologiques (dont celles concernant l'accord Attribut-Nom), et la phrase sera analysée jusqu'au bout. Le système saura que le problème concernait une règle d'accord.

     Ce relâchement progressif des différents types de contraintes permet d'envoyer un message approprié concernant le type d'erreur. Cette aide est sans doute précieuse, mais on peut se demander si l'étiquetage de son type d'erreur aide effectivement l'apprenant.

6. Les commentaires de rétroaction

     Les informations contenues dans le modèle de l'élève permettent de moduler la rétroaction. Si l'apprenant possède un bon niveau de connaissance du sujet sur lequel il vient de faire une erreur, le système lui demande simplement de corriger, sans préciser où se situe l'erreur. S'il est seulement assez bon, le système lui donne un indice et lui demande de corriger. Si l'apprenant connaît mal le sujet, le système pointe l'erreur et la corrige. Sinon, il lui propose une explication concernant l'erreur et enchaîne avec des exercices appropriés. Lorsque l'apprenant n'a pas fait d'erreur, il reçoit simplement un message de félicitations. A la fin d'une session, il est informé de ses progrès concernant les sujets étudiés.

7. L'évaluation du système

     Les auteurs mentionnent l'évaluation qui a été faite du système. XTRA-TE a été testé avec des natifs chinois à l'Université de New Mexico, qui ont trouvé le système 'very helpful and friendly' [19]. Ils reconnaissent toutefois que ces étudiants étaient peu nombreux et que deux points seulement ont été évalués : l'accord entre le sujet et le verbe, et la pronominalisation.

     Ceci s'inscrit, semble-t-il, dans une tendance générale de ces systèmes : leur évaluation est inexistante ou incomplète (aucun ou peu de pré- et de post-tests systématiques), et les activités testées restent assez pauvres (l'exemple type est celui de la vérification des règles d'accord).

IV. LE SYSTÈME VP2

     Le système VP2 a été développé par Ethel Schuster, dans le cadre de l'analyse contrastive. Elle a donc centré son système sur les problèmes d'interférences syntaxiques entre la langue seconde étudiée et la langue maternelle de l'apprenant.

1. Les activités proposées à l'apprenant

     Le système s'adresse à des hispanophones. Il a pour but l'acquisition des constructions verbales de l'anglais et, en particulier, des verbes à postposition. L'apprenant doit traduire en anglais les phrases espagnoles proposées par le système. Là encore le travail se fait donc au niveau de la phrase hors-contexte (nous verrons que l'analyse est même réduite au groupe verbal).

     À l'inverse d'XTRA-TE, le cadre théorique de ce système (l'analyse contrastive), ainsi que le contenu à enseigner sont bien définis. Les exercices portent, nous l'avons vu, sur les constructions verbales de l'anglais. Malheureusement, ce système ne semble pas avoir fait l'objet d'une évaluation en situation réelle d'apprentissage.

2. Le module expert et le modèle de l'élève

     Ces deux modules ici ne font qu'un. En accord avec l'analyse contrastive, le modèle de l'élève se confond avec la grammaire de sa langue maternelle (l'espagnol), considérée comme source d'interférences dans ses performances en langue cible (l'anglais).

     Le module expert contient donc une grammaire de l'espagnol et une grammaire de l'anglais. Chaque grammaire inclut un dictionnaire ainsi qu'une information spécifique sur la construction des verbes.

     Le système extrait le groupe verbal de la réponse de l'apprenant (grâce à un arbre d'analyse syntaxique prédéfini, correspondant à l'exercice en cours). Il est supposé que le reste de la phrase est grammatical. Si une erreur de frappe (ou tout autre type d'erreur non analysable par le système) rend la réponse incompréhensible, le système demande à l'apprenant de recommencer (s'il s'agit de la première fois). Seule cette partie de la phrase sera traitée.

     Si la préposition avec laquelle le verbe s'emploie est manquante ou erronée, le système recherche dans le modèle de l'élève (c'est-à-dire dans sa grammaire de l'espagnol) l'information qu'il possède sur le verbe espagnol qui était à traduire. La comparaison entre la traduction directe de la préposition associée au verbe espagnol et la préposition fournie par l'apprenant (ou leur absence) permet de déceler l'interférence éventuelle.

3. La rétroaction

     Si la construction du verbe espagnol est effectivement la source de l'erreur, le système renvoie la réponse attendue, une explication sur l'interférence et un complément d'information sur les autres prépositions associées au verbe étudié, en fonction des contextes. Si l'erreur ne provient pas d'une interférence syntaxique, le système renvoie seulement la bonne réponse et passe directement à l'exercice suivant. Si l'apprenant n'a fait aucune erreur, il reçoit un message de bonne réponse, une remarque sur le fait qu'il n'y a effectivement pas de correspondance exacte entre la construction espagnole et l'anglaise, ainsi que le complément d'information sur les autres prépositions possibles.

     Remarquons que les commentaires qui renforcent les analogies entre la langue maternelle et la langue cible, en cas d'erreur ou de réponse adéquate, risquent de créer l'effet inverse à celui recherché (faire surgir des interférences jusque là inexistantes). Les erreurs en langue cible semblent plus souvent à chercher dans le système de 'l'interlangue' [20] propre à l'apprenant que dans sa langue maternelle. Cependant, il est certain qu'utiliser ce système propre à l'apprenant, sans parler de son caractère évolutif, semble difficile à gérer automatiquement (aussi bien dans son obtention que dans son exploitation pédagogico-didactique, on retrouve là le problème de base du modèle de l'élève).

     E. Schuster positionne l'analyse constrastive dans un cadre plus général, selon lequel on utilise souvent sa connaissance d'un domaine au moment où l'on en aborde un autre, nouveau mais similaire. Elle applique ensuite ce principe à l'apprentissage d'une langue étrangère. Or, si l'apprenant réinvestit effectivement dans l'apprentissage d'une langue nouvelle c'est, de façon plus évidente, la compétence linguistique générale qu'il a acquise, plutôt que le transfert de structures particulières [21].

V. UN SYSTÈME EXPERT POUR L'ENSEIGNEMENT AUTOMATIQUE DE L'ALLEMAND

     Le système présenté ici (sans nom) a été développé par Camilla B. Schwind pour l'enseignement de l'allemand.

1. Les activités proposées à l'apprenant

     Elles sont de quatre types : formation et transformation de phrases, pronominalisation et traduction.

     Les informations que nous possédons sur ce système correspondent à l'activité de formation de phrases. Il s'agit pour l'apprenant de faire des phrases en allemand à partir d'une liste très limitée de verbes, de noms, d'adjectifs et de déterminants. Au cours de cet exercice, l'apprenant peut poser des questions sur l'exercice lui-même, sur la grammaire et sur les explications fournies par le système. C'est l'interface en langage quasi-naturel qui caractérise plus particulièrement ce système.

2. Le module expert

     Le module expert contient une grammaire composée d'un lexique (chaque entrée est associée à un ensemble de lois grammaticales et sémantiques), d'une base morphologique (informations sur le cas des noms, des déterminants et des adjectifs, et sur les conjugaisons et la construction des verbes), d'un analyseur syntaxique (informations sur la position du verbe, en particulier) et d'une base de règles sémantiques (qui correspondent à des informations du type : humain, objet dénombrable, personnifié, etc.).

     Ce module permet l'analyse des phrases produites par l'apprenant, la synthèse de phrases correctes, le traitement des erreurs et la présentation des règles grammaticales, ce qui paraît assez économique.

3. Le traitement des erreurs

     Les erreurs étant décelées à l'aide des différentes composantes du module expert sont classées selon les mêmes plans : morphologique, syntaxique et sémantique.

     Les erreurs morphologiques, repérées par l'extraction des désinences, correspondent à des erreurs d'accord entre le sujet et le verbe ou entre le verbe et ses compléments. Les erreurs syntaxiques se situent au niveau de l'ordre des mots dans une phrase ou de l'absence de certains groupes fonctionnels. Le système les repère en les comparant à son catalogue des types de phrases erronées. Les erreurs sémantiques portent sur les compatibilités sémantiques qui existent entre les mots d'une phrase.

4. L'interface et les rétroactions

     L'interface de ce système est en langage quasi-naturel (un sous-ensemble du français). C'est elle qui permet le dialogue et gère l'interaction des différents modules.

     L'apprenant peut poser des questions telles que : 'Quelle est la conjugaison de ..... ?', 'Que veut dire ..... ?' ou 'Quel est le pluriel de ..... ?'. Le système y répond en attendant la réponse finale de l'apprenant. Lorsque ce dernier en propose une, il reçoit un message approprié de félicitation ou d'erreur. En cas d'erreur, le traitement du module expert permet de préciser son type. Cette information est renvoyée à l'apprenant en tant qu'indice. Le système lui demande alors de réessayer. L'apprenant peut, à ce moment, reformuler la partie incorrecte de sa phrase, sa phrase entière, demander une explication de l'erreur ou questionner la base de grammaire. Lorsqu'une phrase correcte aura été donnée, le système en attendra une autre utilisant le même vocabulaire.

     Comme XTRA-TE, ce système expert pour l'enseignement automatique de l'allemand ressemble davantage à un 'correcteur de fautes de la langue écrite' [22] qu'à un système d'enseignement portant sur un contenu spécifique. L'interface en langage naturel et une interactivité plus grande constituent l'avantage de ce système sur le premier. Il est cependant nécessaire d'étudier plus avant l'intérêt de cette interface et le type de cette interactivité.

     L'interactivité consiste ici simplement en la possibilité qu'a l'apprenant, grâce à l'interface, de poser certaines questions. Ces questions sont de deux types. Elles portent sur le genre d'un nom, son pluriel ou sa traduction, ce qui revient à une demande d'aide finalement classique. Elles sont également du type 'Pourquoi ?' et nous en verrons une utilisation plus loin.

     L'interface est le support de la rétroaction. Elle fournit une information sur le type de l'erreur et est donnée à l'apprenant comme un indice devant lui permettre de corriger son erreur. Nous nous permettrons cependant d'émettre certaines réserves sur l'utilité du type d'informations fournies. Prenons deux exemples, proposés par l'auteur elle-même :

     1) L'apprenant propose la phrase suivante :

'Der Schuler antwortet den Lehrer' (L'élève répond au professeur)

     Le système lui répond : 'Erreur d'accord entre sujet et objet. La phrase est sémantiquement et syntaxiquement correcte'.

     Or, l'erreur vient du fait que le verbe 'antworten' (répondre) se construit avec le datif (dem Lehrer) et non l'accusatif fourni par l'apprenant (den Lehrer). Le message ' Erreur d'accord entre sujet et objet ' semble alors bien inadéquat. De plus, l'information concernant la correction sémantique et syntaxique ne nous paraît pas particulièrement éclairante pour la correction de l'erreur.

     2) L'apprenant propose :

'Der Lehrer schreibt dem Heft' (Le professeur écrit au [?] cahier)

     Il reçoit alors le commentaire suivant : 'Erreur sémantique entre 'schreiben' et 'dem Heft''. L'apprenant pose alors la question 'Pourquoi ?'. Le système lui répond : ''schreiben' demande un objet vivant. 'Heft' n'est pas vivant'.

     Or, il nous semble évident que l'erreur n'est pas ici sémantique, mais morphologique. Il est en effet peu probable que l'apprenant ait employé ici 'schreiben' dans le sens d'écrire (une lettre) à quelqu'un. L'ensemble du vocabulaire proposé fait référence à une situation scolaire : l'élève, le professeur, etc. Par ailleurs, il n'a pas demandé la traduction de 'Heft'. L'apprenant a certainement voulu dire que 'le professeur écrit dans/sur le cahier'. Cependant, le système n'a pas même perçu l'ambiguïté possible sur l'erreur. En conséquence, l'apprenant a abandonné sa phrase pour en proposer une tout autre.

     Au vu de ces exemples, il nous semble que ce type de rétroaction ne possède pas un intérêt pédagogique majeur. L'inadéquation des commentaires vient clairement de l'utilisation d'un analyseur, qui ne fait que classer les erreurs selon leur type (morphologique, syntaxique, sémantique), au lieu de raisonner sur le contexte de l'erreur. Un analyseur qui travaille sur une classification ne peut apporter aucune explication sur le fonctionnement de la langue, ni d'ailleurs, 'comprendre' une erreur ou détecter des erreurs cachées.

VI. SWIM

     SWIM est un système de génération interactive de phrases, assistant l'apprentissage naturel d'une langue. Il a été développé par M. Zock, L. Laroui et G. Francopoulo (Laboratoire Langage & Cognition, LIMSI, Orsay).

1. Les activités proposées à l'apprenant

     Ce système part de l'idée que, souvent, l'apprenant sait ce qu'il veut dire, mais ne sait pas comment le dire. L'outil qui lui est proposé est donc une interface conceptuelle, devant lui permettre, par la désignation métalinguistique des composants de la phrase à former, d'obtenir du système une réponse à la question 'Comment dit-on <idée> ?'.

     Par exemple, dans le cas de l'apprentissage du français, l'apprenant fait des choix dans les modes proposés : DÉCLARATIF, INTERROGATIF, IMPÉRATIF, choisit entre phrase POSITIVE ou NÉGATIVE, choisit un temps parmi PRÉSENT, IMPARFAIT, FUTUR, PASSE COMPOSE, PASSE SIMPLE, choisit un verbe parmi les quatre proposés, puis il choisit un nom (parmi un choix de six), et précise s'il doit s'agir d'un DÉFINI, d'un INDÉFINI ou d'un PARTITIF, et pour finir d'un SINGULIER ou d'un PLURIEL.

     Le système présente alors un graphe correspondant aux choix de l'apprenant, puis lui demande quelle phrase il produirait par rapport aux éléments qu'il a fournis. Le système donne ensuite sa propre production, en mettant en relief ce qui diffère éventuellement de la production de l'apprenant. A ce dernier de comprendre son erreur éventuelle.

     L'apprenant, après la construction de cette première phrase, peut soit choisir de recommencer l'ensemble du processus pour former une nouvelle phrase (rappelons cependant que le vocabulaire disponible est limité), soit modifier un des éléments de la phrase sur laquelle il vient de travailler. Cette dernière possibilité devrait lui permettre d'observer les variations de surface de l'énoncé en fonction du changement de ses paramètres.

     Nous aimerions, dès à présent, faire quelques remarques sur les a priori du système. Il ne nous semble pas que le système 'conceptuel' proposé permette à l'apprenant d'exprimer véritablement le sens de ce qu'il veut dire. Si tel était le cas, c'est le système qui expliquerait [23] à l'apprenant pourquoi, par rapport à ce qu'il veut exprimer, il lui faut utiliser l'imparfait plutôt que le passé composé, par exemple. Le système devrait également être capable de fournir plusieurs énoncés exprimant de façon variée l'idée à traduire. Il semble, de toute façon, très difficile de demander à l'apprenant quelle est l'idée qu'il veut exprimer en le limitant à quelques paramètres prédéfinis.

     Il peut être très intéressant d'intégrer à une activité l'utilisation d'une métalangue. Cependant, cela demande le recours à une métalangue commune, et donc de connaître celle de l'apprenant [24]. Or, ici aucun public cible n'a été défini. On ne sait pas si ce système s'adresse à des adultes ou à des enfants, quel est leur niveau, leur type de formation, etc. La métalangue utilisée ici semble relever de la 'grammaire traditionnelle', ce qui explique sans doute le manque d'explicitation des termes (on suppose connu de l'apprenant ce qu'est un partitif, par exemple).

2. La philosophie du système

     Le système SWIM est un système d'apprentissage et non d'enseignement. En ce sens, il ne donne aucune explication et ne prend aucune initiative. C'est l'apprenant qui pose des questions ('Comment dit-on <idée> ?', 'Que se passerait-il si <transformation> ?'), choisit les paramètres constitutifs de la phrase qu'il veut faire (mais il doit choisir dans le vocabulaire limité proposé et suivre les concepts grammaticaux utilisés par le système). Il doit également comprendre lui-même ses éventuelles erreurs, en comparant son énoncé à celui produit par le système.

     Réintégrer l'apprenant dans son apprentissage et lui en faire prendre en charge une partie nous paraît une philosophie louable. Cependant, reporter l'ensemble de l'apprentissage dans un cadre d'apprentissage 'inductif' ou 'naturel' fait porter un poids cognitif énorme sur l'apprenant qui, contrairement à ce que donne à penser cette méthode, ne sait pas nécessairement ce qui est 'bon' pour lui. Le mirage de l'apprentissage naturel semble devoir resurgir régulièrement, malgré la démonstration de son inefficacité lorsque ses techniques ne sont pas accompagnées d'un certain encadrement. Bien entendu, ce type de produit pourrait sans doute être utilisé avec profit au sein d'un cursus complet palliant à ses manques, et c'est peut-être dans cette perspective que les auteurs l'ont pensé. Cependant, rien n'est dit à ce sujet dans l'article étudié.

VII. QUELQUES REMARQUES CONCLUSIVES

1. Quels choix pédagogiques et didactiques ?

     Nous aimerions ici rassembler quelques unes de nos remarques générales concernant l'EIAO de langues, en particulier concernant ses limitations pédagogique et didactique, souvent imposées par les techniques utilisées.

     Les exercices proposés restent toujours dans les limites de la phrase (quand ce n'est pas d'un groupe syntaxique). Ce sont généralement des exercices de répétition ou des tests, dont les contenus sont considérés comme des savoirs élémentaires à acquérir (règles d'accord, déclinaisons, pronominalisation, construction du groupe verbal, propositions relatives [25], temps des verbes [26], etc.) et non comme des compétences linguistiques à développer (sauf, avec certaines restrictions évoquées précédemment, le système SWIM). Le niveau visé est généralement celui de débutant, bien que le public cible soit rarement défini avec précision (ce qui va de pair avec le fait que peu de ces systèmes sont effectivement intégrés à une pratique pédagogique réelle).

     Aucun système, à notre connaissance, ne suggère l'utilisation de la langue étudiée pour exprimer une idée particulière, décrire un événement ou structurer un récit [27] (on a vu que le système de M. Zock, dont l'idée est de partir du sens, ne parvient pas réellement à mettre cette idée en pratique). Nous ne considérons d'ailleurs pas que ces activités soient meilleures que les précédentes, et les mises en situation trop artificielles sont également à craindre. Il s'agit ici simplement de noter la remarquable homogénéité des activités proposées. Or, toute activité pédagogique a ses défauts, c'est dans leur diversité qu'il faut chercher à les pallier.

     Par ailleurs, nous avons noté que le cadre théorique et les objectifs d'apprentissage sont rarement définis. Leur explicitation permettrait pourtant parfois de mieux comprendre (aussi bien pour l'enseignant/formateur que pour l'apprenant) comment utiliser cet outil avec le plus de bénéfice. Elle contribuerait, de plus, à développer le sens critique de l'apprenant face à son propre apprentissage, ainsi que ses capacités métalinguistiques, qui sont rarement mises en oeuvre dans les exercices proposés (sauf dans le système SWIM, mais pas de façon adaptée au but recherché, selon nous).

     Lorsque le cadre théorique est explicité, il semble avoir été orienté par sa bonne adaptation aux outils informatiques (telle l'analyse contrastive qui semble, pour certains auteurs, n'être qu'une comparaison de grammaires ou de lexiques, alors que l'utilisation de l'interlangue des apprenants n'a pas été envisagée jusqu'à présent, du fait des difficultés de mise en oeuvre [28]).

     Les commentaires envoyés en réaction aux réponses de l'apprenant se réduisent souvent à l'étiquetage des fautes : morphologique, syntaxique, sémantique, étiquetage correspondant aux catégories de l'analyseur utilisé et non à celles des interlangues en présence.

     L'intérêt pédagogique du niveau sémantique, parfois intégré à l'analyse, nous paraît faible. En effet, l'apprenant qui propose une phrase du type 'La souris mange le chat' sait pertinemment qu'elle n'est pas acceptable d'un point de vue sémantique, dans le contexte de la vie courante. Il est alors inadéquat de traiter la particularité de cette phrase comme une erreur au même titre qu'une incorrection morphologique ou syntaxique. En introduisant des contraintes sémantiques dans l'analyse, on s'interdit également toute utilisation métaphorique du langage.

2. A propos de la liberté d'apprentissage

     Nous aimerions également nous arrêter sur la problématique 'guidage pédagogique vs liberté d'apprentissage'.

     Quelques systèmes d'EIAO de langues reconnaissent n'intégrer aucune compétence pédagogique, comme c'est le cas pour LINGER, développé par M. Yazdani. Son ambition est de pouvoir analyser et corriger n'importe quelle phrase entrée par l'utilisateur. L'apprentissage est libre en ce sens qu'il n'est intégré dans aucun scénario pédagogique et que l'apprenant n'est guidé d'aucune façon. L'auteur reconnaît que la force de son système réside, avant tout, dans la puissance de l'analyse grammaticale et non dans les techniques d'apprentissage. Il nous semble que dans cette perspective, la liberté de l'apprenant devrait correspondre à sa liberté d'entreprendre l'activité qu'il a choisie comme il l'entend. Or, la diversité des activités proposées est généralement très limitée, ce qui réduit considérablement le choix de l'apprenant à ce niveau, d'autant plus que ces activités sont souvent du type production de phrases. La liberté alléguée, qui fait porter tout le poids de l'apprentissage sur l'apprenant, paraît plus souvent, dans le domaine de l'EIAO de langues, un manque d'aide disponible plutôt qu'une liberté réelle.

3. En conclusion

     L'enseignement des langues n'apparaît pas comme le domaine privilégié de l'EIAO. Les contenus en jeu dans cette discipline paraissent trop complexes et se voient donc réduits à quelques 'savoirs de base'. Les activités proposées manquent généralement de diversité et ne sont pas issues d'une réflexion didactique. Ce bilan, plutôt négatif, tient sans doute à la spécificité même de l'enseignement des langues qui ne peut être assimilé à une activité unique telle que la 'résolution de problème', mieux adaptée au type d'environnement proposé et aux outils utilisés en EIAO.

     L'inadéquation de ces outils a oblitéré, dans de nombreux systèmes d'EIAO de langue, les contenus à enseigner et l'attention à porter sur la façon de le faire. Ces aspects pourraient resurgir si l'on cherchait à définir un cadre à l'utilisation de ces produits. Pour cela, il nous semble essentiel d'associer à ces projets, dès leurs débuts, des théoriciens spécialistes de l'enseignement des langues, ainsi que des enseignants/formateurs, de façon à concevoir ces systèmes pour une pratique réelle, en tenant compte, véritablement, de cette pratique.

Odile Blanvillain

Paru dans la  Revue de l'EPI  n° 71 de septembre 1993.
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QUELQUES RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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The Bridge to International Communication : Intelligent Tutoring Systems for Second Language Learning, NATO ASI Series F, Berlin, Springer-Verlag, 1992.

NOTES

[1]. Nous n'avons pas utilisé ici le terme de « tuteurs intelligents » (ITS : Intelligent Tutoring Systems, dans la littérature anglophone), car nous incluons à cette étude des travaux s'intéressant davantage à un type d'apprentissage autonome. Il est vrai, cependant, que la majorité des systèmes d'EIAO actuels appartient à la catégorie des tutoriels (apprentissage guidé).

[2]. Nous citons l'IA à part pour ses techniques spécifiques, ne relevant pas de l'enseignement (langage de programmation, types de représentation des connaissances, etc.).

[3]. Dans le cadre de l'EIAO de langues, ce terme recouvre essentiellement les analyseurs morphologiques, syntaxiques et sémantiques.

[4]. Nous verrons qu'il s'agit, la plupart du temps, d'analyse de phrases (et presque jamais de discours ou d'énoncés en contexte).

[5]. Ces difficultés ont conduit le public à délaisser en partie l'EIAO pour les systèmes, plus rapidement opérationnels, d'hypernavigation et pour le multimédia. Il nous semble qu'il ne s'agit là encore que d'un revirement de la mode, dans la mesure où le concept d'hypernavigation n'est pas non plus sans poser de problème dans son utilisation pédagogique. Quant au multimédia, il correspond à une mise en oeuvre technique, et de ce fait, son bénéfice ne peut relever que de sa bonne utilisation, qui reste souvent à penser.

[6]. Cependant, les étapes du raisonnement d'un système expert (qui est l'outil généralement utilisé pour ce module) ne peuvent pas être utilisées à fins explicatives après coup, dans la mesure où le raisonnement humain n'utilise pas les mêmes stratégies. Pour être explicatif, le système expert doit être conçu directement de cette façon, ce qui demande de repenser largement son fonctionnement. C'est là un sujet de recherche actuel en EIAO et dans le domaine des interfaces homme-machine, en général.

[7]. Nous verrons que les objectifs pédagogiques restent souvent flous dans les systèmes d'EIAO.

[8]. Il nous paraît symptomatique que, dans le domaine de l'EIAO de langues, on parle toujours d'« exercices », plutôt que d'« activités pédagogiques ».

[9]. L'EIAO utilise généralement le terme d'« élève », et non d'« apprenant ».

[10]. Entre autres difficultés, notons que les actions de l'apprenant ne sont pas nécessairement la trace de ce qu'il sait, et que ce savoir, lui-même, est précisément en évolution. Quant à ses stratégies cognitives, elles peuvent changer, elles aussi. De plus, il n'existe certainement pas de correspondance unique et définitive entre une stratégie cognitive de l'apprenant et une stratégie pédagogique à lui associer.

[11]. Expression utilisée par les informaticiens pour distinguer le langage humain des langages informatiques.

[12]. Utilisation de différents artifices pour simuler le langage, en particulier le recours à des schémas de phrases prédéfinis, incluant simplement une partie variable en contexte.

[13]. et actuellement incompatible avec des temps de réponse acceptables dans un environnement d'enseignement / apprentissage.

[14]. WIMP = Window Icon Menu Pointer.

[15]. Les recherches actuelles en traitement automatique du langage, concernant l'analyse textuelle, ne sont certainement pas encore assez fiables pour être utilisées pour l'enseignement.

[16]. Il ne s'agit pas de règles de grammaire, au sens traditionnel, mais des règles du formalisme utilisé (leur forme dépend de ce dernier). 'déterminant + nom -> groupe nominal' peut en être un exemple simple.

[17]. On retire la partie des règles qui impose des contraintes de compatibilité entre les différents éléments de la phrase (accords, compatibilités sémantiques, etc.).

[18]. Les exemples proposés ici sont imaginés par l'auteur, à titre explicatif.

[19]. très utile et convivial.

[20]. système provisoire et évolutif. On parle aussi de grammaire intériorisée ou d''activité interlangagière' de l'apprenant.

[21]. même si cet aspect peut intervenir ponctuellement. La mise en oeuvre de pré-tests auraient sans doute été fort utile ici.

[22]. Nous empruntons cette expression à Brian Farrington.

[23]. Mais ceci irait sans doute à l'encontre de la philosophie du système (cf. VI. 2), qui est un système d'apprentissage et non d'enseignement...

[24]. ou de la construire ensemble, dans le cas d'un tutoriel.

[25]. cf. l'article de L. Emirkanian et L.H. Bouchard.

[26]. cf. le système E.T., développé par D. Fum, C. Tasso et P. Giangrandi.

[27]. Le système S.C.A.R.A.B.E.E. II est un "système de conception assistée de récits d'aventure dans le but d'enseigner l'écriture". Il corrige les fautes d'orthographe, fait des remarques sur la longueur des descriptions (« Sois moins bref ! »), donne des indications sur les éléments nécessaires d'un récit (« Pour créer une bonne ambiance, un récit d'aventure doit comporter des descriptions suffisamment élaborées »). Mais il n'étudie pas les marqueurs linguistiques (temporels et logiques) qui peuvent être utilisés pour le structurer.

Le « Writer's assistant » de M. Sharples propose une aide "en ligne" à l'écriture. Mais il s'agit d'un système d'aide, plutôt que d'un système d'enseignement.

[28]. Le groupe de recherches en cognisciences : Acquisition d'une Seconde Langue Assistée par Ordinateur (SLAO) a établi un projet de recherche autour du diagnostic cognitif en période d'apprentissage d'une langue seconde, reconnaissant l'importance de la 'structure propre des règles de l'apprenant' et de ses 'processus cognitifs d'élaboration d'un nouveau savoir sur la langue cible'. Pour le recueil d'énoncés prévu, les apprenants seront mis dans une situation pédagogique clairement délimitée, ce qui constitue également un aspect novateur dans le domaine. Les objectifs de ce projet semble donc répondre à plusieurs de nos demandes, mais il faudra encore attendre pour voir si leur concrétisation est possible.

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