ÉDITORIAL

 

     La mission fondamentale du système éducatif reste, sans conteste, de permettre à tous les individus d'avoir prise sur leur environnement présent et à venir. Une telle maîtrise suppose nécessairement une compréhension des choses, des autres, des événements. Tel a toujours été le rôle de la culture générale. Ce rôle demeure d'évidence dans des contextes qui se transforment de plus en plus rapidement. Et notre société se doit de proposer aujourd'hui une conception de la culture qui intègre, aux côtés de ses composantes humaniste et scientifique, une composante technique où l'informatique et les techniques associées ont naturellement leur place.

     Les responsables au plus haut niveau en ont maintenant conscience ; c'est ainsi qu'au cours de sa conférence de presse sur la rénovation pédagogique du lycée (Rubrique Documents) le Ministre d'État, Ministre de l'Éducation Nationale a déclaré : « Je revendique la mission fondamentale culturelle de l'École. Je pense que la mission culturelle de l'École, c'est aussi d'intégrer la finalité professionnelle des formations, la dimension technique de la culture moderne. » Et dans le dossier de presse distribué à cette occasion on peut lire : « L'enseignement doit donner à l'informatique une place à la mesure du rôle qu'elle joue dans notre société. » (Rubrique Documents).

     En conclusion de la circulaire de la Direction des Écoles, parue au B.O. du 14 mai 91, on peut lire : « La place grandissante de l'informatique dans notre société et les transformations profondes qu'elle introduit dans tous les domaines, y compris celui de la pédagogie, justifient que l'école s'en préoccupe, à un double titre : à la fois comme outil au service des apprentissages et comme objet de culture. » (Rubrique Documents).

     Nous pourrions reproduire d'autres déclarations traduisant un tel état d'esprit somme toute encourageant.

     Positive est la volonté exprimée, notamment par le Conseil National des Programmes, le GTD « informatique », la Direction des Lycées et Collèges, le CSN, l'Inspection Générale et le Ministre d'État récemment (Rubrique Documents), de promouvoir l'informatique dans l'enseignement des différentes disciplines. « Les programmes revus prendront en compte explicitement la dimension de la place de l'informatique tant pour les modifications des contenus et des méthodes qu'elle engendre que pour les aspects sociaux et économiques » (Dossier de presse du 25-6-91) (Rubrique Documents).

     Le Conseil National des Programmes et les Groupes Techniques Disciplinaires (sous la responsabilité des Directions pédagogiques) travaillent dans ce sens, dans la concertation. Le Bureau national a fait parvenir début août à D. Dacunha-Castelle une note concernant l'informatique au collège et des contributions pour la rénovation des lycées pour les thèmes 1, 4 et 5 (Rubrique Informations générales). Nous rendrons compte dans le prochain Bulletin des réunions qui ont lieu en ce moment.

     Nous n'oublions pas les travaux des Directions pédagogiques, du CNDP, de l'INRP et de nombreuses académies, nous continuons à en rendre compte dans les différentes rubriques du Bulletin.

     Des réalisations, il y en a, heureusement. Nos adhérents le savent bien, impliqués pour la plupart dans des actions nationales, académiques, ou au niveau même des établissements.

     Dans un tel contexte, il est navrant d'assister, après un très mauvais procès, à la disparition de l'option informatique des lycées. Nombre d'entre nous restent persuadés qu'un enseignement de culture générale informatique a sa place au lycée dans le contexte économique, social et industriel actuel. Nous ne reviendrons pas sur nos arguments largement connus (Rubriques Informations générales et Documents) ; peut-être seront-ils un jour de nature à convaincre ?

     Nous n'étions plus pourtant les seuls à plaider. Dans sa note de réflexion n°3 (25 juin 91)(Rubrique Documents), le Groupe Technique Disciplinaire « Informatique » fait également des propositions pour que l'enseignement de l'informatique ait une place convenable au lycée. Dans une note, adressée le 17-04-91 au Directeur des Lycées et Collèges, le Conseil Scientifique National se prononce également clairement pour un enseignement de culture générale informatique pour tous les élèves de seconde en même temps qu'il rappelle son attachement au développement de l'informatique dans l'enseignement des différentes disciplines.

     De très nombreuses réactions au projet de suppression de l'option informatique étaient parvenues au Ministre provenant d'associations, de syndicats, de sociétés savantes, de personnalités et d'élus.

     Ceci étant dit, la rénovation des lycées n'interviendra qu'à la rentrée 92. En tout état de cause l'enseignement de l'option informatique doit se poursuivre, pour les élèves qui s'y engageront cette année en seconde, jusqu'en 1994, année où ils devront pouvoir présenter l'épreuve informatique au baccalauréat. D'ici là... on a le temps de redécouvrir les vertus d'un enseignement de l'informatique, par exemple dans le cadre d'une informatique européenne capable de faire face aux géants japonais et américain.

     Pour l'instant, il y a dans la proposition d'Ateliers de pratique (Rubrique Informations générales), inspirée de celle de l'EPI sur les API (Bulletin n°60, pages 55-56), une possibilité de développement de l'informatique dans les établissements scolaires qui le souhaiteront. Nous rappelons dans les informations générales, à propos de l'audience à la Direction des Lycées et Collèges, les réserves importantes que le Bureau national avait émises à la suite de l'Assemblée Générale 1990.

     Par ailleurs, l'informatique qui permet de diversifier les approches, de répondre à l'hétérogénéité des élèves, de les aider dans leur travail personnel, de valoriser leurs démarches, de leur ouvrir de nouvelles perspectives pour la construction de leurs parcours scolaires... doit pouvoir être largement utilisée au sein du module de 3 heures ainsi que dans les processus annoncés d'évaluation et d'orientation.

     Nous avons déjà fait des propositions en ce sens et avons demandé à M. André Legrand, par lettre du 1-7-91, à être associés aux groupes nationaux de concertation qui seront mis en place.

     Mais il y a malheureusement une autre ombre au tableau, la formation initiale des enseignants. Selon les informations dont nous disposons la place de l'informatique, et plus généralement des technologies modernes, dans les formations prévues est inégale selon les académies et souvent insuffisante compte tenu des enjeux. Pourtant, au cours de sa conférence de presse sur les IUFM, le Ministre d'État a déclaré : « notre système éducatif doit intégrer les apports des nouvelles technologies ». Adapterons-nous « l'école aux besoins des entreprises » (F. Mitterrand le 21-06-91) si les enseignants sont mal formés aux technologies modernes ?

     Il est vital pour l'avenir du système éducatif de redéfinir les compétences des enseignants. Ceux-ci doivent pouvoir intégrer les technologies modernes à leur enseignement, ils doivent surtout être capables d'initier leurs élèves à ces nouveaux outils intellectuels. L'École, naturellement lieu d'information et de communication, se doit d'intégrer résolument les technologies modernes dont la puissance dans ces domaines ne va cesser de croître ?

Paris, le 2 octobre 1991

Jacques LUCY
Président

Jacques BAUDÉ
Secrétaire Général

Paru dans la  Revue de l'EPI  n° 63 de septembre 1991.
Vous pouvez télécharger cet article au format .pdf (68 Ko).

___________________
Association EPI

 

Accueil

Sommaires des Revues