ÉDITORIAL

Chacun connaît maintenant le contenu de la réforme des lycées et chacun jugera sur pièce. Pour ce qui nous concerne nous avons déjà tout dit sur la nécessité d'une approche complémentaire [1] et nous n'avons pas l'intention de nous répéter ici. Les contacts que nous avons eus avec le cabinet du Ministre nous ont montré à l'évidence que faute de moyens supplémentaires des choix avaient été faits : l'informatique dans les disciplines, la mise à niveau des élèves n'ayant pas rencontré l'ordinateur au collège, l'utilisation de l'informatique dans les TPE (voir notre proposition d'élargissement de la définition de TPE "informatiques"), et plusieurs options comprenant de l'informatique (informatique de gestion et de communication, IESP, systèmes automatisés, productique). Ce n'est évidemment pas négligeable même si nous pensons que le système éducatif, et notamment tout ce qui concerne le secteur sensible des "technologies nouvelles", mérite un effort exceptionnel de la nation au lieu de recourir aux habituels transferts de moyens.

L'EPI, qui n'est pas au pouvoir, est intervenue à tous les niveaux pour le maintien d'un enseignement d'informatique de culture générale qu'elle persiste à considérer comme indispensable. Elle regrette que l'amendement présenté en ce sens au Conseil Supérieur de l'Éducation ne soit pas retenu par le Ministère bien que faisant l'objet d'un large consensus et d'un vote favorable (30 voix pour et une seule contre). Il est néanmoins acquis que les élèves en seconde cette année pourront continuer l'option informatique en première et terminale.

L'EPI jugera sur ce qui sera réellement fait, au delà des intentions. Quels moyens va t-on se donner pour évaluer, en matière d'informatique et de NTIC, les connaissances et compétences des élèves entrant en seconde ? Quel programme de mise à niveau envisage-t-on, avec quels enseignants ? Comment le Ministre va-t-il convaincre les différentes disciplines de faire évoluer les programmes d'enseignement pour une meilleure pratique, par les élèves, des NTIC ? Quelles formations pour les maîtres ? Il y a là un vaste chantier qui ne se suffira pas de déclarations.

A quelques mois de l'an 2000, au moment où l'on débat sur l'école du XXIe siècle, sur le collège, sur le lycée, au moment où l'on prend conscience de la pénurie d'informaticiens (et de "ticiens" en général) et du retard de la France dans le domaine de l'innovation, l'EPI continue à plaider inlassablement pour l'intégration de l'informatique et des NTIC dans la culture générale du futur citoyen, sous toutes les formes possibles. Il faut donner au plus grand nombre les connaissances et compétences leur permettant des réalisations effectives, notamment sur Internet, sous peine de n'en faire que des consommateurs de produits fabriqués ailleurs.

Dès l'école élémentaire, plus qu'une formation à l'informatique, il s'agit de savoir utiliser l'ordinateur et les technologies associées de manière raisonnée et finalisée. Mais le risque est de ne percevoir l'ordi-nateur que comme un "outil" ; il s'agit en fait d'un média d'éducation pluridisciplinaire qui a ses spécificités et ses limites. Seule une intégration aux pratiques et à la vie de la classe peut clairement légitimer son développement à l'école.

Au collège, nous le savons trop, l'enseignement de la technologie dont son important volet informatique, est très inégalement assuré faute notamment d'enseignants formés et de matériels en nombre suffisant. Pour les mêmes raisons et faute de pression des programmes, l'utilisation de "l'outil" informatique dans les différentes disciplines et activités se développe peu. Les NTIC devraient être mises au service du travail autonome des élèves, c'est encore rarement le cas...

Le chantier ouvert est vaste et difficile et nous ne traitons pas ici des problèmes qui se posent dans l'enseignement supérieur et dans la formation des enseignants. Tout ne pourra être fait dans l'instant, des mesures progressives doivent être prises, dans les différents ordres d'enseignement, à la hauteur des besoins et des enjeux. La formation aux NTIC est un investissement fondamental pour l'avenir économique, social et culturel de notre pays.

Secrétariat National de l'EPI

Paris, mars 1999

Paru dans la Revue de l'EPI n° 93 de Mars 1999.

NOTES

[1] Voir les précédentes Revues de l'EPI, les déclarations des AG, les analyses et les propositions, en particulier :

« Pour le développement de l'informatique pédagogique dans le système éducatif » (1990),

« Pour une culture générale en informatique à l'école, au collège et au lycée » (1992),

« Pour une évolution du système éducatif à l'aube du XXIe siècle » (1994),

et « Un défi et une urgence pour le système éducatif : intégrer les technologies modernes » (1996).

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(11 avril 2000)