L'INFORMATIQUE POUR TOUS
 

Présentation à la presse, le vendredi 25 Janvier 1985, par M. Laurent Fabius, Premier Ministre, en présence de Messieurs :
Gaston Defferre, Ministre d'État, chargé du Plan et de l'Aménagement du Territoire.
Jean Pierre Chevénement, Ministre de l'Éducation nationale.
Roger-Gérard Schwartzenberg, Secrétaire d'État auprès du ministre de l'Éducation nationale, Chargé des universités.
Roland Carraz, Secrétaire d'État auprès du Ministre de l'Éducation nationale, chargé de l'Enseignement Technique et Technologique.
Gilbert Trigano, délégué du Premier Ministre aux Nouvelles Formations.
 

Le Premier Ministre

LE PLAN « INFORMATIQUE POUR TOUS »
 

     Mesdames et Messieurs,

     Le Président de la République a tracé les lignes d'action de notre pays dans le domaine de l'informatique et de l'enseignement. Beaucoup d'efforts positifs ont déjà été entrepris.

     À partir des leçons qui peuvent être tirées, nous avons décidé de changer de vitesse et de lancer aujourd'hui un plan extrêmement puissant. Ce plan s'appelle « informatique pour tous ». Il a un triple objectif :

1°) Il s'agit d'initier à l'outil informatique tous les élèves de toutes les régions de France. Les 11 Millions d'élèves de nos établissements publics pourront désormais dans chaque commune, avoir accès à l'ordinateur au cours de leur scolarité, afin de permettre une meilleure égalité des chances. Tous ceux qui sortiront dès l'an prochain d'un cycle terminal de lycée d'enseigne- ment professionnel, du 1er cycle des universités auront travaillé sur un ordinateur pendant au moins une trentaine d'heures.

2°) Nous avons décidé d'ouvrir cet outil informatique à tous les citoyens. Les établissements, les matériels, les programmes qui seront enrichis, seront donc également à la disposition du public. Bien entendu, cela nécessitera des accords avec les collectivités locales et les associations pour déterminer les conditions d'accès et de fonctionnement.

3°) De très nombreuses équipes d'enseignants vont être formées, que je remercie de leur concours. 2 500 ont déjà suivi un stage d'un an, 45 000 un stage d'initiation. Dès cette année, 110 000 enseignants de plus recevront une formation. Elle sera dispensée dans des conditions telles qu'aucune perturbation n'intervienne dans le bon déroulement de l'année scolaire.

     Tout cela veut dire concrètement que cette année 11 000 ateliers informatiques seront installés dans les établissements scolaires comprenant chacun plus de 6 micro-ordinateurs familiaux ou semi-professionnels, cependant que les 33 000 écoles de taille plus modeste recevront, elles, l'équipement minimum d'un ordinateur Ainsi seront installés en 1985 120 000 micro-ordinateurs supplémentaires pour un coût total, avec la formation, de près de 2 milliards. Le fonctionnement devra être mis en place dès la pro- chaîne rentrée.

     Compte tenu de son importance, je m'engage personnelle- ment à mener à bien ce plan. Plusieurs Ministres m'assisteront dans cette tâche au premier rang desquels le Ministre d'État, chargé du Plan et de l'Aménagement du Territoire qui me suppléera si nécessaire. J'en confie la responsabilité technique à Monsieur TRIGANO assisté de Monsieur GREFFE. Je réunirai les Préfets de Région et les Recteurs dès la semaine prochaine afin de mettre en oeuvre ces décisions.

     Mesdames et Messieurs, la formation est l'investissement le plus important de la Nation, la clef de voûte de lia modernisation du pays. L'informatique va devenir de plus en plus une véritable seconde langue. L'objectif du Président de la République, le nôtre, est de faire de cette génération la mieux formée de notre histoire. Grâce à ce plan, la France va être dès cette année un des premiers pays du monde, probablement le premier, dans l'enseignement de l'informatique pour tous.

  

ANNEXES

120 000 MICRO ORDINATEURS SUPPLÉMENTAIRES EN 1985

     Dès 1985, tous les établissements d'enseignement public disposeront de l'outil informatique. C'est un élément essentiel à la modernisation du pays. POURQUOI ?

     Le plan « informatique pour tous » vise trois objectifs :

1. Initier tous les élèves de chaque niveau d'enseignement à l'outil informatique : dès juin 1986, tout élève sortant d'un cycle terminal de lycée, de lycée d'enseignement professionnel, du 1er cycle des universités aura travaillé sur un ordinateur pendant au moins une trentaine d'heures. Cela permettra une meilleure égalité des chances.

2. Ouvrir les ateliers d'informatique à tous les citoyens dans un cadre contractuel négocié avec les collectivités locales ou les associations.

3. Former les équipes d'enseignants : dès décembre 1985, plus de 150 000 enseignants auront été initiés au langage informatique.

COMMENT ?

     L'outil informatique sera installé :

  • sous forme d'un équipement de base dans 33 000 écoles,

  • soit sous forme d'un atelier informatique dans chaque université, dans chaque lycée, dans chaque collège et dans 10 000 écoles.

1. dans 33 000 écoles, l'équipement de base comprendra un micro- ordinateur de type familial, un téléviseur couleur, les logiciels

2. dans chaque université, dans chaque lycée, dans chaque collège et dans 10 000 écoles, les ateliers seront implantés à raison d'un atelier par université, par lycée, par collège ou par groupement de 4 à 5 écoles correspondant à 400 - 500 élèves.

     Les configurations de ces ateliers seront de deux types :

  • 6 micro-ordinateurs de type familial reliés en réseau à un micro-ordinateur de type semi-professionnel,

  • 8 micro-ordinateurs de type semi-professionnel.

     Les équipements seront comparables et compatibles avec ceux utilisés actuellement dans les établissements de l'Éducation nationale.

     En dehors des heures scolaires, les ateliers seront ouverts à tous selon des modalités propres à chaque établissement et utilisateur (association, groupement, collectivité...) et de manière contractuelle, en concertation avec les collectivités locales.

     Au total 120 000 micro-ordinateurs supplémentaires seront installés en 1985.

     Ainsi, fin 1985, compte tenu de l'effort déjà entrepris depuis trois ans, 160 000 micro-ordinateurs seront mis à la dis- position de 11 Millions d'élèves ou d'étudiants.

UNE FORMATION SYSTÉMATIQUE DES FORMATEURS

     Un plan de formation des enseignants est systématiquement associé à l'implantation de chaque atelier : dès le départ, il est prévu de former un nombre minimum de 10 enseignants par atelier, soit 10 enseignants par groupement d'écoles, ou par collège, ou par lycées.

Personnel à former : Écoles Collèges Lycées Total
8 000 23 000 3 500 106 500

     La formation de ces enseignants est réalisée au cours d'un stage intensif (50 heures) dans des conditions telles qu'aucune perturbation n'intervienne dans le bon déroulement de l'an née scolaire.

     Dans le cadre des enseignements supérieurs, la formation est prévue pour 800 enseignants au cours d'un stage intensif (300 heures) durant la période où il n'y a pas d'enseignement dans les universités.

     Ainsi, à la fin de l'année 1985, près du quart des enseignants des établissements scolaires et universitaires aura reçu une initiation à l'informatique.

UN COÛT GLOBAL DE DEUX MILLIARDS DE FRANCS

1. La formation des formateurs, animateurs de l'opération, ainsi que les dépenses de fonctionnement et de logiciels pour l'initiation des élèves seront prises en charge par le budget de l'Éducation nationale (environ 400 MF supplémentaires seront mis à sa disposition).

2. en ce qui concerne le matériel (de l'ordre de 1 600 MF), il sera financé d'une part par le Ministère des PTT, tuteur de la filière électronique, qui le mettra à disposition du Ministère de l'Éducation nationale et d'autre part grâce à un prêt do Fonds Industriel de Modernisation (F.I.M.).

3. L'Union des Groupements d'Achats Publics (U.G.A.P.) qui procède déjà à l'acquisition des matériels équipant les établissements scolaires, sera le maître d'oeuvre de l'opération.

« INFORMATIQUE POUR TOUS » ET LES OPÉRATIONS DÉJÀ LANCÉES

     Un certain nombre d'opérations ont déjà été lancées : les centres X2000 (Agence de l'Informatique - A.D.I., les clubs Microtel, les initiatives du Centre Mondial, les actions des Associations et clubs divers...).

     Le projet « informatique pour tous » ne remet nullement en cause ces opérations.

     Il est souhaitable au contraire qu'il y ait synergie entre des initiatives variées et complémentaires.

     Des entraides sont envisageables : c'est ainsi que des Centres existants pourraient prêter leur concours pour la formation des TUC qui participeront à la marche des ateliers...

COMPLÉMENTS D'INFORMATION

Le Bureau Nationa1 de l'EPI a établi rapidement le contact et recueilli des informations auprès de la Mission des Technologies Nouvelles. Il a accepté de mettre gracieusement à la disposition de la Mission, 250 Dossiers « informatique à l'école » et 250 Dossiers « informatique au collège » pour les ateliers ouverts pendant les vacances de printemps, ainsi que la disquette EPI n° 4 de lecture rapide (LIRA) pour les ateliers de « type lycée ». Il s'est engagé à diffuser très rapidement des informations vers les Bureaux Régionaux. Un premier courrier a été posté le 15-02 (voir extraits ci-dessous) à tous les Présidents et Secrétaires des Régionales en leur demandant de le faire suivre aux membres des BR ainsi qu'aux collègues susceptibles d'être directement concernés : équipes de formateurs, Centres de formation, Écoles normales, CRDP... Un second courrier a suivi, le 25-02, comportant la note 850006 du 19-02 sur les journées de regroupement des 4 et 5 mars ; en annexe, des précisions sur les ateliers informatiques et le nombre de stages minimum à organiser dans chaque académie pendant les vacances de printemps.

Informations complémentaires recueillies par le B.N. le 15-02-85

. FORMATION : Objectifs des stages de formation des enseignants : faire comprendre le fonctionnement des réseaux et les applications possibles : logiciels pédagogiques, traitement de texte, bases de données, gestion de fichiers, prolongements télématiques... Quelques notions plus techniques et éléments de maintenance.

Calendrier des stages (environ 5 000) : 500 stages dès les vacances de printemps (10 000 enseignants) qui permettraient de faire fonctionner plus de 1 000 ateliers dès la mi-avril. 2 500 stages en juillet. Le reste fin août-début septembre et aux congés de la Toussaint. Pour que les premiers stages aient lieu les ateliers devront arriver dans les Académies dès la fin février.

Formation des formateurs : Afin de préparer les stages de 6 jours qui auront lieu dès les vacances de printemps, une réunion sera organisée les 4 et 5 mars 96 Bd Bessières à PARIS. Chaque académie y sera représentée par 2 personnes (formateurs, anciens stagiaires, prof. d'E.N.) qui auront ensuite à organiser des stages de mise à niveau de 2-3 jours) pour les formateurs qui encadreront les stages de printemps (6 jours=48 heures). Une de ces personnes devrait être liée à une structure fixe (Centre de formation, E.N.) qui pourrait servir de base logistique à l'opération.

La formation des enseignants est sous la responsabilité des Recteurs.

Matériel de formation : Il devrait être à la disposition des Recteurs pour le 15 mars : Un guide d'atelier, un guide technique-maintenance, un ensemble de logiciels... etc.

Accompagnement financier : Les formateurs recevront une indemnité de 5 200 F. Les enseignants formés recevront 1 000 F. d'indemnité plus 200 F. d'indemnité de transport. Le personnel ouvrier et de service   sera également indemnisé à raison de 50 F. par jour pour deux agents par stage. S'ajouteront les frais d'hébergement et de nourriture : dotation de 120 F. par jour.

Remarque importantes Les opérations de formation déjà organisées ou en cours ne sont pas remises en cause.

Cette initiation qui aura concerné 110 000 enseignants en 1985 devra être élargie et approfondie en 1986.

Au cas où cela se révè1erait nécessaire, le recours au réseau X2000 (ADI) pourra être envisagé en liaison avec l'Éducation nationale.

Il pourra être fait appel aux jeunes relevant du programme « Travaux d'Utilité Collective » TUC.

ATELIERS

a) implantations

Le choix de l'implantation incombe aux Recteurs. Ils devront :

  • assurer une extension géographique maximale et équilibrée, de façon

  • à minimiser les coûts d'accès des élèves comme du public.

  • privilégier les établissements où des enseignants sont déjà formés ou en cours de formation.

  • privilégier les écoles comprenant plusieurs cours moyens.

  • répartir les ateliers « lourds » dans les lycées et établissements à vocation technique professionnelle.

  • ne pas refuser l'implantation d'un atelier dans un établissement ayant un équipement obsolète.

  • s'assurer que les collectivités locales continuent à participer à l'équipement des établissements scolaires.

Les rectorats devront transmettre à la MITEN :
Pour le 25 février : 2 lieux d'implantation de nanoréseaux devant servir à la formation des formateurs (courant mars).
Pour le 1er mars : 20 à 30 lieux d'implantation des ateliers pour les stages des vacances de printemps.

b) matériels

- pour 8 000 Écoles et 2 500 Collèges (coût unitaire : 90 000 F. UGAP)

  • tête de réseau : Bull 90 30 et Logabax Personna 1600, avec, sous réserve de vérifications Matra X20, Goupil 3 PC, Silz 16 Léanord.

  • une carte de connexion, six boîtes de connexion sur MO5 et système d'exploitation/1 disquette (Léanord).

  • six MO5, six cartouches RAM, six moniteurs couleur.

Rem : Pour les premières livraisons, en attendant la disponibilité de la disquette langage pour tête de réseau (mai), les cartouches RAM seraient remplacées par des cartouches Logo.

  • périphériques : modem permettant la connexion au réseau Télétel, imprimante, lecteur-enregistreur de programmes pouvant être branché sur un MO5.

  • pour 550 lycées(coût unitaire 300 000 F. UGAP).

  • 4 micros parmi les suivants : Personna 1600, Matra X20, Goupil 3 PC et Sil'z 16. L'un des micros étant doté d'une unité de disque dur, d'une imprimante et d'un modem. Plus huit nanos.

Remarque : pour les 33 000 écoles ne recevant pas d'atelier, il est recommandé l'achat du TO7-70 avec : moniteur couleur, lecteur-enregistreur de programmes, cartouche Basic, cartouche Logo, contrôleur de communication, imprimante à impact. Dans la mesure où les crédits le permettraient mémoire de 32 K supplémentaire, unité de disquette, tortue, extension télématique permettant d'accéder au réseau Télétel.

==> Nous vous donnons ces indications, et en particulier les indications chiffrées, sous toutes réserves. Elles peuvent subir des modifications en fonctions de différentes contraintes (budget, possibilités des constructeurs...).
       Demandez à prendre connaissance des textes officiels qui vont arriver dans les rectorats.

Paru dans le  Bulletin de l'EPI  n° 37 de mars 1985.
Vous pouvez télécharger cet article au format .pdf (127 Ko).

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