Éditorial
 

     Le plan INFORMATIQUE POUR TOUS constitua un pari exceptionnel dont les médias ont mal apprécié la dimension. Il n'est pas seulement un nouveau progrès ; il provoque un brutal changement d'échelle : en moins d'un an c'est six fois plus de machines, six fois plus d'enseignants recevant une formation et vingt fois plus de sites équipés que prévus dans le plan précédent. À la fin de 1985, grâce à 120 000 machines ajoutées cette année aux 40 000 déjà installées, un enseignant sur quatre devra avoir reçu une initiation. En juin 1986, tout élève ou étudiant sortant du système scolaire aura travaillé sur ordinateur.

     Un grand défi est lancé aux constructeurs comme aux producteurs et distributeurs de logiciels (pourront-ils fournir en quantité et en qualité ?), aux formateurs (plus de deux cents centres dès les vacances de printemps et des milliers de stages en moins de six mois) et aux autres enseignants de qui dépendra le sort de l'entreprise.

     Sans négliger les difficultés et les risques, l'E.P.I. approuve ce plan très ambitieux qui confirme ses analyses : dès 1971, l'association affirmait sa vocation à rassembler tous les enseignants qui allaient être progressivement concernés par l'informatique ; en 1976, elle faisait des « propositions pour une généralisation de l'introduction de l'informatique dans l'enseignement » car « nul ne peut ignorer l'informatique dans la monde moderne ». Depuis, elle a souvent dénoncé les tergiversations, les lenteurs, les fausses prudences masquant mal l'hostilité à l'informatisation.

     Le passé pèse encore lourd aujourd'hui. Après l'enthousiasme des cinq premières des années 70, le coup d'arrêt de 1976 fut un très mauvais coup : cinq ans sans équipement, sans véritable formation. Placée « sur orbite d'attente » l'expérience périclita laissant un vivier trop appauvri pour donner un bon départ au plan des 10 000 micro-ordinateurs.

     Depuis 1981, une politique volontariste, de plus en plus affirmée, justifie une continuelle accélération : dans la rude compétition mondiale, l'impératif vital pour la France, c'est la modernisation qui passe par le développement rapide des technologies nouvelles, en particulier de l'informatique. Cela requiert un immense effort de formation et « l'Éducation nationale doit être le fer de lance de la modernisation ». C'est ainsi que le plan informatique pousse l'école publique au premier rang et confie à ses enseignants une position stratégique. Organisation de proposition et d'action en faveur du déploiement de l'informatique dans l'ensemble du dispositif éducatif, attachée au Service public d'enseignement, l'E.P.I. ne peut donc s'abstenir et abandonner à d'autres la place que l'expérience et la compétence de ses membres, notamment en matière de formation, lui permettent de tenir.

     Mais cet engagement ne saurait être aveugle. Chacun se préoccupera des moyens de la réussite : crédits suffisants et surtout moyens en personnel, en postes. Chacun s'assurera que les opérations antérieurement programmées seront bien poursuivies et rappellera « qu'il est impossible d'enseigner convenablement ce qu'on ne maîtrise pas », qu'une formation ne se réduit pas à une initiation à la programmation en un langage pour un seul type de machine. Chaque enseignant doit être mis à même de choisir dans le large éventail des possibilités des matériels et leurs panoplies instruments pédagogiques. Un stage d'une semaine pendant les vacances n'assure qu'une approche superficielle et nécessite des sessions de formation complémentaires. La généralisation en cours ne se conçoit pas sans une introduction rapide et significative de l'informatique dans toutes les formations initiales des maîtres.

     Enfin la modernisation n'ira pas sans rénovation et sans innovation pédagogiques. Le plan INFORMATIQUE POUR TOUS offre l'occasion de mieux baliser le chemin de l'informatisation de l'école et d'ouvrir, pour l'informatique pédagogique, un grand débat d'idées dans lequel s'insérera naturellement le nouveau manifeste de l'E.P.I.

     L'enjeu est considérable, il doit entraîner la mobilisation de tous afin que soit gagné ce pari si important pour l'avenir de notre pays.

Paru dans la  Revue de l'EPI  n° 37 de mars 1985.
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